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Ce sont des contrats à durée indéterminée, ce ne sont pas des « CDD » (Contrat à Durée Déterminée). Lorsque l’employeur est à l’initiative de la rupture, le salarié a droit à un préavis, de deux semaines ou de un mois suivant son ancienneté. Seulement pendant les deux premières années de ce CDI, le contrat peut être rompu librement avec simplement l’envoi d’une Lettre avec recommandée avec accusé de réception. Il y a une simple notification de la rupture. Lorsque l’employeur est à l’initiative de la rupture également, et sauf si le salarié a commis une faute grave, le salarié a droit à une indemnité égale à 8% de la rémunération brute totale. Je précise au passage qu’en cas de non-renouvellement d’un CDD une indemnité de précarité est versée… elle est égale à 10% !
D’autre part le titulaire d’un CPE a accès aux indemnités de chômage au bout de 4 mois et non 6 mois comme en droit commun. Précisons que la prise en charge n’est pas longue : elle est seulement de 7 mois. Le salarié peut bénéficier du droit au congé individuel de formation au bout d’un mois « pro rata temporis » : c’est à dire ? En droit du travail, ce droit au congé formation c’est 20h par an : faites le calcul pour vous rendre compte à quoi cela correspond au bout d’un mois ! En termes de formation cela ne va pas être brillant !
31 articles du code du travail ne sont pas applicables à ce type de contrat : cela fait échapper ce contrat à la substance du droit du licenciement. Des précisions s’imposent ici. Le droit du travail a évolué depuis 1973. Depuis 1973, l’employeur n’a plus de droit de rompre unilatéralement le contrat : il existe au contraire nécessité de se fonder sur une « cause réelle et sérieuse ». C’est cette exigence qui n’existe pas pour le CNE et le CPE puisque la rupture n’a pas à être motivée. L’entretien préalable au licenciement n’a pas non plus à s’appliquer à ces nouveaux contrats. C’est très important : réfléchissons à ce que cela veut dire pour un jeune de moins de 26 ans qui entre sur le marché du travail. On va faire connaître au jeune le monde de l’entreprise : un monde où l’on peut vous dire « Merci ! on ne veut plus de vous ! », sans même dire pourquoi ! Ce n’est pas purement symbolique, cela représente quelque chose de très important. Je reviens sur l’absence d’exigence d’une cause réelle et sérieuse.
Prenons la mesure de ce que cela signifie. D’abord en matière de preuve. Il y a eu là aussi une évolution très importante du droit du travail. Alors qu’en droit commun c’est le demandeur à l’allégation qui supporte la charge de la preuve, en matière de rupture de Contrat à Durée Indéterminée (CDI), la charge de la preuve est partagée. Le doute profite au salarié : ceci ne vaut pas pour le salarié en CPE ou en CNE. Le salarié pourra éventuellement se prévaloir – Dimitri Houtcieff en parlera – d’un abus de droit et il devra démontrer que l’employeur a commis une faute. Ceci renvoie à une jurisprudence… de 1872 !
En matière de licenciement économique, la cause réelle et sérieuse existe aussi : elle signifie que le salarié n’est pas une variable d’ajustement, que le travail n’est pas une marchandise, comme l’affirme de manière très belle l’Organisation internationale du travail depuis 1919 ! Ce n’est pas là une simple déclaration moralisante : c’est un principe qui a des conséquences précises en droit du travail : le salarié est sujet de droit, il n’est pas une variable d’ajustement, ce qui explique que le législateur exige une cause réelle et sérieuse contrôlée par le juge. Sur ce terrain de licenciement, il existe également une obligation de reclassement préalable à toute décision de licenciement économique, prévue par l’article L321-1 du Code du travail : ce texte n’est pas applicable au CPE ! Voilà des éléments très précis qui montrent que le CPE est un recul. Une lecture attentive du texte nous apprend aussi qu’en matière de licenciement disciplinaire, on retrouve l’application obligatoire de l’entretien préalable et de la motivation… concrètement, le titulaire d’un CPE qui veut établir le fait qu’il a été licencié pour un motif disciplinaire en violation des dispositions du droit du travail devra « s’auto-accuser » d’une faute disciplinaire : il a intérêt à ce que la faute soit légère : si la faute est grave, il perdra le droit au préavis et à l’indemnité ! On n’est pas loin de l’usine à gaz !
Pour l’employeur non plus, le CPE n’est pas sûr. Les contentieux ne seront pas limités, bien au contraire. Tout le contentieux de la nullité du licenciement demeure applicable au CPE et au CNE : interdiction du licenciement discriminatoire, interdiction de porter atteinte aux libertés individuelles, aux droits de la personne… : si un licenciement intervient contrairement à ces règles, il est nul. Il existera donc un contentieux, et il sera beaucoup « plus dur » : ce contentieux pourra en effet déboucher sur une injonction de réintégration ! Le CPE n’est donc même pas sûr pour l’employeur !
Enfin, le CPE place la France dans l’isolement. : on peut faire la comparaison avec les autres pays. Avec cette période de deux ans, la France est un cas unique. Certains ont parlé de l’Espagne : c’est faux ! La durée de la période d’essai en Espagne est de six mois. La seule personne qui ait tenté quelque chose de similaire, c’est Margaret Thatcher ! En 1985, elle a introduit un « order » qui réservait au salarié ayant deux ans d’ancienneté le bénéfice de ce que les anglais appellent « unfair dissmissing », le licenciement illégitime. Madame Thatcher a fait marche arrière : la période de deux ans a été rapportée à un an…. De plus, en novembre dernier, la CJCE a rendu un arrêt le 22 novembre 2005 interprétant la directive communautaire du 27 novembre 2000 relative à l'égalité de traitement dans l'emploi et le travail. Il souligne qu’il existe un principe de non-discrimination selon l’âge. Selon elle, à partir du moment où seul l’âge fonde la différence de champ d’application de certains CDD, il y a atteinte au principe de non-discrimination.
En France, le Conseil d’Etat s’est prononcé. C’est la violation par le CNE de la convention n°158 de l’OIT qui a été invoquée par l'ensemble des organisations syndicales représentatives de salariés, qui exige l’existence d’une motivation pour tous les licenciements. Les Etats peuvent l’écarter en posant des conditions d’ancienneté « raisonnable ». Le Conseil d’état a jugé à propos du CNE que la condition d’ancienneté de deux ans était raisonnable pour faire échapper à l’obligation de motivation. Le juge judiciaire aura cependant à se prononcer. On peut penser qu’il n’aura pas la même vision de ce qui est raisonnable pour faire échapper à la condition d’ancienneté.
Deux autres d’instruments méritent d’être évoqués : la Charte sociale européenne, adoptée par la Conseil de l’Europe, dont on estime qu’elle ne peut être invoquée directement, et la Charte de l’Union européenne, qui affirme tout de même le droit des travailleurs à une protection contre le licenciement injustifié. Voilà ce que je pouvais dire sur le plan du droit du travail.
Applaudissements.
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