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L'En Dehors


Quotidien anarchiste individualiste





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De I'Anar Circus au Cirque Bidon
L'ivresse du spectacle anime une petite troupe qui se déplace à la vitesse de ses chevaux, autrefois fort loin, aujourd'hui surtout dans la région.
La neige tombée en abondance pendant ma tournée m'aura empêché de visiter le Cirque Bidon aui avait tant émoustillé ma curiosité. Installée depuis cinq ans au sud du Berry, pas loin de Sainte-Sévère (!), une partie de la drôle de troupe des Bidons qui, à la douce vitesse des chevaux, a sillonné la France, l'Italie, la Sardaigne durant les années 70 -90, a retapé une ferme et tourne dans la région. François Rauline, un des co-fondateurs de ce cirque si original, m'a donc adressé une lettre bourrée des traces et des mots qui racontent l'aventure de ces circassiens radicaux. Dès sa création, la troupe opte pour un cirque de petite taille, tiré par les chevaux et qui ne vit pas de subventions, de sponsors ou d"`aides" culturelles, mais de la générosité des gens et du riche hasard des rencontres.
"Après la "révolution" de 68, je quitte Paris malgré un travail lucratif qui m'intéressait (ciseleur sur bronze). Continuer à vivre de la même façon après ce beau rêve, ce bel espoir, n'était plus possible. Si je ne peux pas changer la société, je peux au moins changer ma vie" annonce d'emblée François.

Rencontre d'une trapéziste qui ne veut plus travailler pour le grand cirque traditionnel, construction d'une roulotte, achat d'un cheval, embauche dans un petit cirque traditionnel ; François se balade en France et cherche à construire le cirque qui lui trotte dans la tête. Ce sera l'Anar Circus, une roulotte qui intervient sur les marchés et dans la rue.

Une troupe autogérée

Suite à la rencontre en Bretagne d'autres roulottiers, musiciens et cracheurs de feu, le Cirque Bidon naît. Sans matériel et sans argent, quatre verdines et une dizaine de chevaux partent et s'arrêtent sur les places des villages où un public nombreux les rencontre. Les polices, du garde champêtre aux pandores, qui escorteront et ouvriront plus tard la voie du cirque devenu renommé, harcèlent alors la lente troupe bigarrée des saltimbanques. Ce sont plusieurs contrôles par jour, des perquisitions dans les roulottes et des ordres pour... ramasser le crottin qui souille le pays (dixit le garde champêtre) ! Excédé, François Rauline laisse un jour échapper sa colère. Lors d'un énième contrôle et l'affaire ayant suivi son sale cours, il écopera d'un mois de prison ferme à Rodez pour insulte à agent. Mais la petite troupe ne suivra pas ces "conseils" des bonnes gens et de la maréchaussée : "Si vous voulez être tranquilles, vivez comme tout le monde avec une maison et un travail fixe. On ne vous emmerdera plus".
Le cirque grandit et partira souvent en Italie où l'accueil est chaleureux et la "générosité incroyable", et c'est là-bas qu'il prendra alors toute sa force (1). Les repos hivernaux permettent de réparer les chariots, d'imaginer et de construire piste ou gradins pour les numéros à venir. Lentement ("avec jouissance de cette lenteur"), 20 à 25 km par jour, le Cirque Bidon s'épanouit à chaque saison. Cette troupe autogérée (2) se sépare dans les années 80. Le matériel communautaire est partagé et chaque groupe ou famille reprend la route avec roulotte, chevaux et nez rouges.

Cultiver son jardin

En 2002, François et les siens s'installent dans une petite ferme qu'ils retapent, avec ce "plaisir de faire pousser des carottes, de vivre sur sa production maraîchère, de faire du foin pour les chevaux, et d'entretenir les roulottes et le matériel de cirque". Après quelques spectacles bénévoles pour les fêtes de leur commune de cent habitants, ils préparent Ça tourne, une création pour le centenaire de la naissance de Jacques Tati. Six roulottes et une dizaine de chevaux emmèneront, de mijuin à fin août, une douzaine d'artistes, musiciens et techniciens pour une petite tournée régionale. Du nord de la Creuse au sud de l'Indre, le nouveau Cirque Bidon vous invite à rire, penser et pleurer sous les millions d'étoiles d'un chapiteau déguisé en ciel (3). Et évidemment, ce ne sont ni les sous privés ni les fonds publics qui les auront fait remonter sur les planches mais bien l'ivresse du spectacle comme la générosité et l'attention du public !
MaB

avec l'aide de François et Fidji Rauline
Cirque Bidon, Les Mouligoux, 36160 Vigoulant, tel : 02 54 30 68 59.

(1) Voir les fantastiques photos et textes sur http://digilander.libero.it/circobidon/index_foto.html
(2) Les postes de trésorier et de secrétaire sont soumis au vote ; ils durent un mois (non renouvelable aussitôt) et tournent ainsi de l'une à (autre des membres de la troupe durant la saison artistique d'avril à novembre. La recette, les fruits ramassés dans la tournée du chapeau sont également partagés entre les acteurs de la troupe qu'ils soient techniciens, chauffeurs, cuisiniers ou saltimbanques spécialisés ; et les décisions sont prises en commun.
(3) Avec 300 places assises, le cirque joue en plein air (en palque) et fait relâche les jours de pluie.

S!lence #348 été 2007

Ecrit par libertad, à 16:03 dans la rubrique "Projets alternatifs".



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