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Lu sur : Chez Stella « Vous trouverez dans les pages de cette édition "spécial prison" des textes de femmes, transsexuelles et travesties d’ici et d’ailleurs qui traitent non seulement de leurs rapports à la prison, mais également de leurs rapports à la police, à l’arrestation et à la Cour. Car bien que nous n'ayons pas toutes vécu l'incarcération, beaucoup de travailleuses du sexe ont eu "à faire" soit avec la police, soit avec le système judiciaire.
Partout sur la planète, la répression contre les travailleuses du sexe est à la hausse et fait des ravages. À Montréal, alors qu’en 2001 on comptait 38 arrestations pour sollicitation sur le territoire de la ville, en 2004, il y en a eu 715 pour les neufs premiers mois de l’année seulement ! Que ce soit au nom de la gentrification des quartiers, de la lutte anti-trafic, de la dite réhabilitation, les travailleuses du sexe, celles qui travaillent sur la rue surtout, sont toujours celles qui paient le plus cher le prix de la répression. Les tactiques des policiers ont changé. L’impact de la criminalisation, les conséquences néfastes elles, demeurent. Nos vies sont souvent dévastées par ces entrées et sorties constantes d’en d’dans. Par les quadrilatères aussi, la "nouvelle punition pour les putes de rue". On nous restreint le droit de circuler, nous coupant ainsi l’accès aux services essentiels comme les services de santé, de soutien, de garderie, etc. Il y a aussi bien sûr la perte de nos revenus, parfois celle de notre logement. Sans parler du retrait de la garde de nos enfants. On nous renvoie dans nos pays d’origine ou on nous force à aller dans des centres sous prétexte de nous sauver. Et quand on trouve un refuge, comme c’est le cas de Chayna que vous pourrez lire dans ces pages, on vient nous chercher pour dénoncer Untel, sans compassion, sans délicatesse, au prix de notre sécurité !
Les prisons sont pleines. Et "qu’esse ça donne ?" Le nombre de femmes incarcérées atteintes du VIH est de 8,8% comparativement à 2,3% chez les hommes! Au Canada en 2001, 42,4% des femmes incarcérées au fédéral vivaient avec l’hépatite C1 ! Et c’est encore pire pour les femmes autochtones. Chose certaine, suite aux ateliers sur l’hépatite C que nous avons donnés à Tanguay et à Joliette, avec Solanges Dion, nous pouvons témoigner que les besoins d’information et de soins sont énormes !
Pourtant, nous ne sommes pas moins nombreuses à faire du travail du sexe. On a besoin d’argent, d'explorer, de s'éclater, de vivre ! Mais quand on travaille sur la rue, on a doublement peur : des fous furieux et de la police. De l’arrestation, mais aussi des attitudes désobligeantes, du mépris, du harcèlement, des agents doubles. On travaille plus tard, la nuit, dans des coins plus noirs, plus reculés, prenant ainsi plus de risques. Alors qu’elle est censée nous protéger, la police nous harcèle et nous fout en taule! Y’a vraiment quelque chose qui cloche. Non seulement nous sommes 20 fois plus victimes d’agressions que d’autres femmes, nous sommes aussi la cible de l'acharnement des policiers ! En effet, les policiers posent en clients, achètent deux, trois roches de crack aux filles et les arrêtent, soit pour sollicitation ou, encore plus payant pour eux (sic), pour trafic de drogues. Et ensuite, quoi ? Qui? Les danseuses migrantes, celles qui travaillent dans des salons de massage, les escortes, le Web ? Ça va faire !
Ailleurs, dans le monde, les travailleuses du sexe font également l’objet de répression accrue. Et partout, nous réclamons le respect de nos droits fondamentaux et nous luttons pour la décriminalisation. Au Canada, selon la loi, faire du travail du sexe est légal pourtant, nous sommes encore et toujours considérées comme des criminelles. Mais de quoi au juste sommes-nous coupables ? Les lois seraient-elles au service de certaines morales ?
Les femmes sont de plus en plus criminalisées et peut-être posent-elles de plus en plus de gestes criminels de toutes sortes. Mais qu’est-ce qui définit la notion de crime ? Trop de questions pour un seul numéro !
Quoiqu’il en soit, les femmes qui remettent en question "l’ordre établi", les lois et les structures sociales, celles qui ont un style de vie différent, qui consomment des drogues, qui sortent des rangs, les femmes pauvres et malades, les femmes qui se tiennent debout autrement ou plient les genoux parfois sont toujours marginalisées, criminalisées, isolées, incarcérées. Et c’est triste.
Ce que nous voulions, en réalisant cette édition, c’est donner la parole à des femmes, travesties et transsexuelles qui font du travail du sexe. Donner la parole aussi à d’autres femmes incarcérées, par le biais d’une série d’ateliers d’écriture. Et vous verrez, c’est plein d’amour !
Le texte de la page couverture est tiré d’une bannière déroulée sur l’église St-Nizier à Lyon en France, en juin 1975, lors d’une action de prostituées. Nous avions installé une bannière similaire sur l’immeuble abritant nos locaux lors de la Marche mondiale des femmes en 2000. Pour cette édition "spécial prison" du ConStellation, il allait de soi pour nous de réaffirmer ce puissant énoncé. »
STELLA
1. L’échange de seringues en prison : leçons d’un examen complet des données et expériences internationales. Réseau juridique canadien VIH/sida, 2004, pp.9-10.