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Dans
un climat social qui s’aggrave et caractérisé par une atonie inquiétante des
victimes du système et de sa crise, ces suicides prennent incontestablement une
dimension sociale et politique qui renvoie aux impasses du « mouvement
social » et aux limites des dispositifs traditionnels de défense des
salariés. Nous arrivons à la fin d’une époque.
TRAVAIL ET CONSCIENCE DE CLASSE
Le
travail est une activité sociale, ceci veut dire qu’il n’est pas une simple
activité matérielle et technique, mais qu’il se fait dans un cadre de relations
sociales. La manière de produire et de
répartir les richesses produites se fait dans le cadre de rapports sociaux.
Ceci
est générateur, dans l’espèce humaine, d’une conscience sociale qui donne un sens
à l’acte de travail, qui permet à tout un chacun, quelle que soit sa place,
d’en avoir conscience.
La
division technique du travail,
toujours en évolution du fait du perfectionnement des outils de la production,
s’est bien évidemment accompagnée d’une division
sociale. Cette division sociale a
placé les individus dans des rapports de domination et de dépendance, des
rapports de pouvoirs, des rapports de propriété et d’exploitation qui constituent
d’ailleurs le substrat et le moteur de l’Histoire humaine. Tous les conflits se
jouent dans cette sphère et leur issue sont les changements de rapports
sociaux.
Ce
que l’on appelle la conscience de classe
– terme aujourd’hui, à tort, oublié – est cette faculté humaine à avoir conscience de la place que l’on a dans
la société, dans ces rapports de production, et la faculté à
« dépasser » cette situation pour faire cesser l’exploitation dont on
est victime.
Cette conscience de classe est à la fois l’expression d’une souffrance et d’un espoir.
Aujourd’hui,
si les salariés ont nettement conscience d’une souffrance dans leur condition
de vie et de travail, ils n’ont par contre plus beaucoup d’espoir pour ce qui
est du changement social. Pourquoi ?
LE LAMINAGE INEXORABLE DE LA CONSCIENCE
DE CLASSE
Jusqu’à
disons les vingt dernières années du 20e siècle, les salariés dans
les pays développés ont eu, sinon espoir de renverser le système dominant, du
moins d’en tirer des avantages substantiels – ce que l’on nomme aujourd’hui les
acquis sociaux.
La
prédiction, à la fin du 19e siècle et durant une bonne partie du 20e,
du renversement du capitalisme par la
classe ouvrière, ne s’est pas réalisée – Les quelques expériences d’une
société qui se voulait idéale se sont terminées en fiasco complet en moins d’un
siècle, brisant dans une longue agonie idéologique, la perspective d’un
changement radical à court terme.
L’espoir, deuxième composante de la
conscience de classe, s’est résumé en un lent grignotage d’avantages sociaux
dans un capitalisme qui voulait et pouvait se payer la paix sociale.
On
peut dire, qu’au cours du 20e siècle la conscience de classe s’est
émoussée contre le dynamisme du Capital, la déliquescence des modèles de
« socialisme réel », aidé en cela par des organisations politiques
plus intéressées par les avantages quelles pouvaient tirer de la situation que
par un réel désir de la changer (des noms ?).
C’est
dans cette perte de vitesse, et de substance, de la conscience de classe
qu’intervient, au détour des années 80, la vague
libérale. Surdéterminée par l’effondrement du bloc soviétique à la fin de
cette décennie, elle emporte tout sur son passage : La classe des salariés, jusqu’alors
considérée comme « partenaire » du Capital, devient un simple instrument de production, une variable d’ajustement dans le calcul
économique gestionnaire, dans la grande course au profit qui se fait désormais
à l’échelle mondiale. La rationalisation, la rentabilisation réduisent de
manière drastique le nombre de salariés, les délocalisations déstructurent, et
fragilisent les entreprises avant de les faire disparaître. La classe des
salariés se transforme peu à peu en masse hétérogène où la volonté de lutter contre l’exploitation, cède la place à la peur
de l’exclusion.
DES « ACQUIS SOCIAUX » A… NO
FUTURE
La
vague libérale, jouant à fond les intérêts du Capital, avec son cortège de
déréglementations, de liquidations des services publics, stoppe net tout ce qui
faisait l’espoir des salariés : l’amélioration de leurs conditions par des
miettes chèrement conquises. Mais elle va plus loin,… elle s’attaque désormais aux « acquis sociaux » du passé.
Tout y passe : retraites, santé, école, social, services publics,
condition de travail, statut des salariés,…
La
course au profit ne connaît plus de limite et traque au niveau du simple
salarié les contre temps, les « inadaptations » aux nouveaux critères
de rentabilité. Les menaces se généralisent, les sanctions pleuvent, les
mutations mutilent les esprits et les corps. Ce qui restait de conscience
explose sous la contrainte.
Les
syndicats, parfaitement intégrés depuis des décennies à gérer une situation où
ils pouvaient jouer un petit rôle et faire retirer quelques bénéfices aux
salariés sont complètement dépassés. Leur rôle se résume désormais à gérer la
catastrophe qui s’abat sur celles et ceux qu’ils avaient la prétention de
défendre. Manifestations, pétitions, occupations symboliques, cortèges plus ou
moins folkloriques… tournées en dérisions par le patronat et l’Etat, ne servent
plus à rien.
Description
d’apocalypse sociale diront
certains ! Oui , pourtant la triste réalité. Et c’est justement dans
ce contexte que les plus fragiles craquent.
Quand
sur le plan syndical c’est le vide, aussi bien tactique que stratégique,, quand
on voit la débilité et la pusillanimité des organisations politiques dites
« de gauche », voire « révolutionnaires », quand la cohésion
de classe est brisée, quand les perspectives de, sinon changement, du moins
amélioration, sont absentes,… que reste-t-il à celle ou celui qui subit ?
La tentation de l’autodestruction est grande.
Le
suicide ne résout évidemment pas les problèmes qui y ont conduisent… mais il
interroge. Il est en fait politique et
social. Vouloir en faire un simple fait personnel, comme tentent de le
faire les gestionnaire du capital, est tout à fait logique de leur part. Mais
que dire de la part des syndicats qui se contentent de s’indigner et de
simplement dénoncer ? Mais que dire des organisations politiques qui
surfent sur la vague de mécontentement pour… faire des voix aux prochaines
élections ?
On est aujourd’hui devant une faillite
totale de la stratégie politique et syndicale. Une déconnexion absolue entre
les pratiques obsolètes des politiciens et syndicalistes face à une situation
nouvelle de la domination du Capital, la mondialisation.
Cette
faillite laisse dans un désarroi total les salariés partagés entre la révolte
brute, la violence – destruction de locaux, menaces de faire sauter leur usine,
ou la dérision affligeante comme un « concert pour « fêter »
une… défaite » ( ?) (MOLEX –septembre 2009)… - et la forme ultime de
protestation, l’auto destruction.
Si
le Capital est responsable de cette situation, les organisations politiques et
syndicales, qui ont l’exorbitante ambition de « défendre les intérêts des travailleurs », n’en portent pas
moins une part de responsabilité, celle de leur
incapacité à penser une autre stratégie de lutte et de défense, ce qui en
principe justifie leur existence.
Oublier
cela c’est ne se livrer qu’à une complainte sur la « dureté des
temps » et la « méchanceté des dirigeants »,… que l’on reconduit
tout de même systématiquement.
Octobre 2009 Patrick MIGNARD
Voir
aussi :
« LE
TRAVAIL EN QUESTION » (1) (2) (3) (4)
« LE
TROISIEME AGE DU SYNDICALISME »