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Sans Titre : "La défécation est un moment fort de la vie: qui ne se souvient de l'effroi du marmot qui voit pour la première fois le maelström de la chasse d'eau engloutir sa création, une parcelle de son soi, dans les abîmes de l'égout. Jusqu' à la nostalgie du bon vieux temps médiéval, époque formidable où l'on voyait les étrons braver le vide depuis les latrines vertigineuses des donjons. La défécation est aussi un moment fort du capitalisme d'aujourd'hui. Si vous dites pipicaca au patron de la Lyonnaise, il ne grimace pas, il ne rigole pas, il salive.
Chaque année un-e occidental-e consomme environ 6 000 litres d'eau potabilisée pour embarquer ses excréments vers d'autres horizons. Avec la nouvelle loi sur l'eau qui oblige les communes françaises au tout-à-l'égout, la liberté de l'épuration individuelle saute et les lobbies se frottent les mains devant les milliers de kilomètres de conduites, les centaines de stations de pompage et d'épuration à installer. Sous couvert de progrés écologique, on consolide un système pourtant débile, qui fait se mélanger des déchets avec de l¹eau pure, souvent rendue potable à grands frais. A ce gaspillage, on ajoute l'hérésie biochimique qui consiste à passer en mode anaérobie, beaucoup plus lent dans la digestion et sécréteur de sous-produits nauséabonds alors qu'une mise en valeur directe est possible par la voie du compostage à sec et aérobie.
L'alternative aux chiottes innondées, ce sont les chiottes sèches, qui pour s'imposer doivent se bagarrer avec les habitudes de plus en plus coincées de nos contrées riches, où s'assume de moins en moins le corps dans son entropie, que cela soit pour la mort ou pour la merde. Un trône en porcelaine avec au milieu un trou de mémoire, c'est plus facile.
Les arguments sont reconnus quant il s' agit des loisirs du dimanche sur les îles Glénans ou dans un refuge haut alpin, mais pour les cas standards, le public s'acharne toujours à user de la chasse d'eau et ce n'est pas la DASS qui va l'en dissuader, puisque la réglementation est draconnienne et en gros interdit le compostage. Les particuliers qui en France utilise le procédé sont donc minoritaires alors que dans les contrées lointaines où l'eau est rare et les problèmes d'hygiène intenses les chiottes sèches ont depuis longtemps fait l'objet d'obligés programmes de développement et perfectionnement par les gouvernements et les ONG.
Les procédés sont multiples. le plus connu est celui du trou au fond du jardin, simple, mais trés mauvais sur le plan de l¹hygiène et de la pollution puisque la prolifération microbienne est entretenue, les mouches abondantes et le compostage mal maitrisé. Les systèmes les plus perfectionnés, super luxe mais super débiles sont basés sur le principe d'une cuve qui déssèche le caca électriquement pour ensuite l¹évacuer ou l'incinérer...
Entre les deux, les procédés abondent, les véritablement malins étant ceux séparant le pipi du caca et ajoutant à ce dernier pour un bon compostage de la matière organique sèche et pure comme de la sciure ou du carton déchiqueté, ou encore de la terre, bien sèche. Le pipi n'est pas un polluant en soi et peut être épandu une fois dilué. Le caca emmitouflé dans la sciure ou la terre sèche se déshydrate, les fermentations et odeurs résultantes sont rapidement bloquées et le compostage commence, aidé par le rééquilibrage du rapport carbone/azote, défavorable au départ quand la merde est pure.
A l' approche du No Border Camp de ce juillet 2002, en plus des questions de contenu, se pose celles de l¹intendance: il faudra se nourrir, bivouaquer et bien sûr pisser et caguer. Pour nos idées comme pour notre merde, un des principes qui nous animent semble être l¹autonomie et la remise en question, et il y aurait quelque chose d'incohérent à sous traiter la gestion de nos excréments, d'autant que le système de chiottes de chantier est pas vraiment économique puisque les prix moyens tournent autour de 180 euros H.T. pour 10 jours de location avec 3 maintenances (c'est à dire pompage des pipicacas, nettoyage et réappro pécu, et bien sûr une imprégnation d'un sublime parfum Senteur Pinède ou Rose Eternelle). Si on part sur la base d'une population camp de 1 000 personnes en moyenne, il faut probablement compter au moins 5 chiottes, soit un budget de prés de 1 000 euros avec une garantie trés moyenne de la destination des excréments et un charme nul. Beaucoup plus économiquement, avec les avantages d' être écolo et autonome, il y a moyen de bâtir une structure légère en bois formant estrade sur pilotis, accueillant des futs métal 200 l. équipées d'une sellette séparative, et couverte et cloisonnée en bâche.
Pour le complément de compostage, le plus simple est la sciure ou les copeaux (gratuits en scierie ou ateliers de menuiserie) mais le plus efficace est la terre sèche, qui accroit considérablement la vitesse de stabilisation et de compostage et permet une restitution rapide en milieu naturel au terme du camp. Sur cette base indicative, on peut estimer les besoins en temps et matériel et dollars: < bois de la structure (160 m./l.): floquettes achetées en fôret: environ 36 pièces soit 60 à 100 euros ou sapin scié (env. 2 m3.) soit 500 euros< matériaux récupérables à la fin du camp. < bois du plancher: environ 27 m2. soit 180 euros., là encore récupérable si vissé. < Bâche et tissus: peut être 120 euros si récup compliquée. < Pour la terre séche, il faut résoudre le problème de l¹approvisionement et du séchage. Pour l¹appro, deux solutions: l¹achat (un camion de 10 tonnes de terre <soit 6 000 litres<coùte sur Grenoble environ 160 euros) ou la récup. Pour le séchage, le mieux est d¹épandre sur un parking ou tout autre surface facile à balayer (et ensoleillée). Il faut une surface de 10 m2. environ pour sécher le volume d¹un fut. Une fois le séchage effectué, on stocke la chose en sacs rafia et youkaïdi. Besoin estimé: 8 chiottes X 200 l. X 4 remplissages = 6 m3 au mini. < futs, sellettes, tuyau d¹arrosage et bidons plastiques pour réseau urine: récup facile des ingrédients. < ficelle, visserie, clouterie et cordelette pour brêlages (ligature: cela évite trop d¹assemblages sciés): environ 120 euros. Côté fric, le cout est donc approchant, avec l'énorme avantage de la récupen fin de camp (dans la mesure où les flics ou les fachos nous laisse le temps...) temps de montage de la structure à 6 personnes: 3 jours environ équipement intérieur: 2 jours. + préparatifs des éléments fut/sellette.