Lu sur
Amerikenlutte :
"La Justice ordonne l'expulsion de l'Hôtel Bauen, qui a été récupéré par ses travailleurs. Ceux-ci lient la décision avec le triomphe de la droite à Buenos Aires et anticipent qu'ils résisteront son application.
La Justice intime les travailleurs de l'Hôtel Bauen
à restituer le bâtiment dans les 30 jours à ses anciens propriétaires.
La résolution signée par la juge Paula Hualde est arrivée vendredi à
l'hôtel et les travailleurs ont commencé à débattre d'une stratégie
pour empêcher l'expulsion. Avec cet objectif, ils ont appelé à une
réunion ouverte pour le lundi 23 juillet dans le bâtiment de l'avenue
Callao.
Fabio Resino, membre de la coopérative des
travailleurs, a lié la décision judiciaire « au changement politique »
produit par le triomphe de Mauricio Macri à Buenos Aires. Resino a
rapporté que, de manière simultanée à l'ordre d'expulsion du Bauen, «
vient de sortir une autre résolution judiciaire qui ne reconnaît pas le
caractère insalubre du travail dans le métro », où s'exprime un
nouvelle conflictualité syndicale, « et sont apparus des obstacles pour
réglementer la loi qui permettrait d'exproprier les entreprises
récupérées de la Ville ».
La décision de la juge Hualde profite
à Mercoteles S. A., à qui il est ordonné de transférer le bâtiment. Les
travailleurs du Bauen ont dénoncé qu'il s'agit d'une entreprise liée
aux vieux propriétaires de l'hôtel. L'histoire est compliquée : Marcelo
Iurkovich a inauguré le Bauen pour le Mondial 1978 avec un crédit du
Banade, qu'il n'a jamais terminé de payer (on estime qu'il doit encore
13 millions de pesos). En 1997, il l'a vendu à la compagnie chilienne
Solari S. A., qui a aussi contracter des dettes pour plus de 5 millions
et a conduit l'hôtel à la faillite en 2001, en laissant tout le
personnel dans la rue. En 2003, un groupe de travailleurs l'a occupé et
il l'a postérieurement réouvert. Ils ont ainsi récupéré 154 postes de
travail.
«
Mercoteles S. A. soutient qu'elle a acheté l'hôtel, fin 2005 ou début
2006, c'est à dire quand les gens étaient déjà à l'intérieur », a
détaillé hier Diego Carbone, avocat de la coopérative. « Comme
directeur de Mercoteles apparaît Samuel Kaliman, un homme de 70 ans qui
est beau-frère de Marcelo Iurkovich ». Le soupçon que Kaliman soit en
réalité un prête-nom des anciens propriétaires est soutenu en outre par
d'autres indices. L'année dernière, Kaliman a déposé une plainte à la
justice contre les travailleurs, pour manque de sécurité dans le
bâtiment, l'hôtel a été transitoirement fermé et l'affaire s'est
terminée par un procès.
Lors des auditions, « Kaliman n'a pas
su donner le domicile légal de Mercoteles, ni les jours de reunion du
directoire ni les noms des partenaires les plus importants », a indiqué
Carbone, qui en son temps a porter plainte pour que soit réalisées des
recherches sur véracité du directeur.
Depuis la réouverture de
leur lieu de travail, les travailleurs de l'hôtel ont impulsé plusieurs
projets d'expropriation, mais aucun n'a prospéré. Ils proposaient que
l'Etat, comme créancier des deux gestions antérieures (en raison du
crédit non remboursé du Banade et la dette pour des impôts municipaux),
utilise ces dettes comme partie du paiement du bâtiment.
Malgré
ceci, en décembre 2005, la droite du parlement de Buenos Aires a
approuvé un projet contraire : il établissait restituer l'immeuble à
ses anciens propriétaires, leur annuler les dettes et leur accorder une
subvention pour payer les salaires des employés pour un an. La pression
des mobilisations a réussi à le désactiver.
Actuellement, le
Bauen fonctionne à plein régime. En plus de travailler avec le
tourisme, ses salons sont quotidiennement utilisés par des
organisations sociales et politiques, et pour des activités
culturelles. Au bar, se croisent des étrangers et des activistes
syndicaux, et un pourcentage des chambres sont réservées à des
militants sociaux de l'intérieur du pays quand ils ont besoin de passer
quelques jours à Buenos Aires. Il n'y a pas de conflit social dans la
ville qui n'a pas installé un point de rencontre dans l'hôtel. C'est
pourquoi on en déduit qu'une éventuelle expulsion trouvera le lieu
entouré de soutien social. Les travailleurs n'ont pas encore défini la
stratégie légale à suivre ; pour le moment ils ont anticipé qu'ils ne
laisseront pas le bâtiment et ont appelé à la réunion ouverte pour
organiser le soutien à la coopérative.
1- En juin dernier,
Mauricio Macri, entrepreneur de droite, a remporté les élections
municipales de la ville de Buenos Aires, et entrera en fonction en
décembre prochain. (NdT).
Laura Vales, Pagina/12, 22 juillet 2007. Traduction: http://amerikenlutte.free.fr