Argentine : Criminaliser c'est réprimer
Depuis quelques années, plus précisemment à partir du dernier gouvernement de Menem (1994), il se passe ce que nous connaissons comme criminilisation de la protesattion sociale. Ceci consiste en gros à appliquer le code pénal, prévu pour des délits communs,contre ceux qui réclament travail digne, santé, éducacion, justice.
Cette utilisation indue du code pénal contredit au grand jour la Constitution que ceux d'en haut ont rédigée, vu qu'ils ne permettent pas les protestations, qui sont un droit légitime.
Il y a ceux qui affirment que couper une route, une rue ou prendre une entreprise sont des actes qui sont hors la loi et que pour cela la justice doit agir et réprimer. Pour nous opposer à cette vision de la réalité (que les médias massifs comme la radio ou la télé annoncent intensément) nos avons nos arguments qui peuvent être des plus variés.
Ces arguments peuvent se diviser à notre avis en deux lignes argumentales différentes qui sont très solides et pas nécessairement opposées.
Depuis l'idéologique. Nous sommes convaincus que ces lois sont quasiment dans leur totalité faites et appliquées par les puissants pour maintenir l'ordre social et le reproduire. C'est à dire que rien ne change et que ceux d'en haut continuent de vivre sur l'effort de la grande majorité du peuple. Les privilèges dont jouissent les capitalistes ont besoin d'un cadre légal qui les garantissent. C'est pour cette raison que nous avons les lois que nous avons (à l'exception de quelques unes arrachées par la lutte), ceci changera si nous sommes capables de transformer la réalité et d'en finir avec cet ordre social injuste.
Depuis le légal et en prenant en compte le sens commun. Toutes les lois n'ont pas la même importance. Dans la Constitution Nationale sont proclamés -entre autres- le droit à un logement digne, à la santé, à l'éducation, à un travail digne et bien rémunéré. Pas besoin de trop d'analyse pour nous rendre compte que ces droits sont violés et ne sont pas respectés. Nous pouvons dire que le gouvernement, ou pour être plus exact, les gouvernements, ont piétiné, de manière permanente et effrontée, les droits gagnés dans la lutte. Ensuite, ils ne vont pas se criminaliser entre eux. Ils sont en train de violer toute la législation sociale, sans parler de celle du travail avec le travail au noir et tants d'autres questions.
Jamais le droit à la libre circulation (automobile) ne peut être au-dessus des droits mentionnés auparavant.
Eux, ceux d'en haut, sont les véritables délinquants, et en plus, ils nous accusent, nous ceux d'en bas, pour résister.
QUELQUES MODALITES DE CRIMINALISATION DES LUTTES :
- Utilisation de figures pénales abusives. Ceci dans le but d'empêcher toute libération conditionnelle des accusés. Cela consiste à appliquer des figures pénales habituellement utilisées pour juger des bandes organisées ou pour des délits économiques.
- Inculper les victimes au lieu des responsables. Un clair exemple de cette modalité est le massacre du pont Pueyrredon (juin 2002-2 morts) où la justice n'approfondit pas l'enquête concernant les assassinats mais en retour surveille les organisations qui ont participé à cette mobilisation et maintient des inculpations pour "attentat à la démocratie" sur quelques victimes de cette répression.
- Faiblesse des preuves. Cela consiste à ce que, dans beaucoup de cas, les juges prennent la parole des policiers qui ont réalisé les arrestations comme quelque chose de quasiment sans appel, alors que nous savons que la parole ou le récit ne constituent pas en soi une preuve suffisante et que de plus ils peuvent être inventés ou malintentionés (cas des détenu(e)s de la mairie de Buenos Aires).
- Policiers sans identifications. Ce gouvernement a été intimé par le Centre d'Etudes Légales et Sociales (CELS) à veiller à ce que tous les policiers qui encadrent des manifestations soient parfaitement identifiés. Loin de le faire (et malgré un accord médiatisé), les policiers en civil sont à chaque fois plus nombreux, ce qui donne lieu à des provocations et des montages qui ensuite sont utilisés pour criminaliser des manifestants en les accusant injustement.
QUELQUES REFLEXIONS
L'injustice qui est en train d'être commise est très évidente et ses contrastes frôlent le ridicule. Si nous voulons voir les délinquants, il suffit de regarder ceux d'en haut. Des personnages comme Domingo Cavallo (ancien ministre de l'économie de Carlos Menem, qui touchait un salaire d'une fondation privée, la Fondation Méditerranée, alors que c'était interdit, qui s'était emparé des dépôts des gens et qui a étatisé la dette externe privée), Mathov (ministre de De la Rua (ancien président en 2001), impliqué dans les assassinats du 20 décembre 2001), Juanjo Alvarez (responsable politique du massacre du pont Pueyrredon), sans parler des sénateurs corrompus (payés par les services secrets de l'Etat pour voter une réforme du droit du travail, NdT), des militaires génocidaires qui marchent dans les rues, de la Citibank qui blanchit l'argent. Ibarra (maire de Buenos Aires) pour Cromañon (discothèque où sont mortes 194 personnes pour non respect des normes de sécurité à cause de la corruption, NdT), etc. La liste est longue.
Il sont quasiment tous libres ! Beaucoup n'ont même pas été convoqués par la justice pour déclarer !
En revanche, nos compagnos sont en prison.
Le 4 juillet 2004, le ministre de l'Intérieur, Anibal Fernandez, a demandé à la justice d'agir "avec le code pénal à la main" pour réprimer. Ces déclarations peuvent être prises par beaucoup de procureurs et de juges comme une carte blanche pour judiciariser et criminaliser les activistes.
DEUX CAS EMINENTS EN 2004 :
- Caleta Olivia
Les chômeurs ont occupé les installations pétrolières de Termap à Caleta Olivia (province de Santa Cruz) et ont coupé la route pour demander du travail. Ils sont en prison et ont été inculpé de "privation illégitime de liberté aggravée, menaces, dommages, usurpation, attentat, résistance à l'autorité et ralentissement de l'activité industrielle" (rapport du CELS).
- Mairie de Buenos Aires
Une provocation dégénère en troubles lors du vote du nouveau code pénal de la ville de Bs As. Pour les incidents, 15 personnes ont été inculpées de délits comme privation illégitime de liberté, coactions aggravées, dommages qualifiés et résistance à l'autorité. (rapport du CELS)
Comme conséquence de cette politique de criminalisation de la protestation sociale il y a plus de 4 000 inculpés et plus de 40 prisonniers politiques, parmi eux Gabriel Roser, compagnon du MUP, qui a été vistime d'une manipulation de la part d'un "puntero" (homme de main) du parti péroniste de son quartier, avec la complicité du commissaire.
Nous sommes conscients que nous pouvons inverser cette situation seulement en nous organisant.
Liberté pour tous les prisonniers politiques !
La Voz de los Sin Voz (La voix des sans voix),
Un projet du Collectif Editorial DESALAMBRANDO
Mars 2005
colectivo_desalambrando@yahoo.com.ar
Traduction : Fab (santelmo@no-log.org)