Après le barnum "citoyen" de Grenoble : Le « rebond » que vous ne lirez pas dans Libération
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Indymédia Grenoble : "Dans Libération du 17 septembre 2007, Max Armanet, « directeur du développement » et Laurent Joffrin, directeur de la rédaction, tirent sur une double page leur bilan du barnum « citoyen » par eux organisé, à Grenoble. Les docteurs en communication connaissent cet exercice dit de « spin effect », destiné à biaiser les impressions dans le sens désiré. En l’occurrence, il s’agit de calmer les inquiétudes du public et des confrères, alertés par de fâcheux compte-rendus des évènements à la MC2 de Grenoble, ainsi que les timides murmures des journalistes maison, en conférence de rédaction. Après tout on n'est jamais si bien loué que par soi-même.
Ironiques, les deux lascars opposent les « 20 000 personnes inscrites
pour participer aux débats », au nombre des manifestants « estimé à 150
» qui ont protesté à l’ouverture du barnum. 20 000 personnes, c’est
dérisoire si l’on songe aux 800 000 visiteurs de la foire aux bestiaux
de Beaucroissant (38), le même week-end. Mais ils n’étaient pas 20 000,
la plupart des spectateurs s’étant inscrits à plusieurs séances pour
amortir leur déplacement, ou revenant deux jours de suite. On le sait
parce que dès le deuxième jour, nombre d’entre eux refusaient L’Etabli
Noir, contre-journal du barnum : « merci, je l’ai déjà eu hier ». Et 10
000 entrées avec le soutien de France Culture, France Bleu, France
Info, des collectivités locales, du quotidien local (panneaux Decaux,
feuilleton pleines pages dans Le Daubé), ce n’est plus un succès. En
revanche, il est rare dans notre époque blasée et où tant de sujets
mobilisent leur attention, que des activistes, militants,
syndicalistes, associatifs, se donnent la peine d’un rassemblement
contre une opération de presse. Armanet et Joffrin le savent si bien
qu’ils l’ont tu tant qu’ils ont pu. Et quand ils ont dû parler, sous la
pression du public, de journalistes, de la contre-information, ils en
ont menti.
« Par ailleurs, en raison de menaces diffusées par de petits groupes et
pour respecter le dispositif de sécurité garanti aux membres du
gouvernement, une surveillance avait été organisée à l’entrée. Il y a
eu deux incidents mineurs pour lequels (sic) nous avons présenté nos
excuses (une ou deux personnes ont été retenues à l’entrée quelques
minutes). Nous prendrons toutes mesures la prochaine fois pour
concilier protection et fluidité d’accès. » (Libération. 17/09/2007)
Nous mettons Armanet et Joffrin au défi de produire les prétendues «
menaces diffusées » et de nommer ces mystérieux « petits groupes » dont
ils parlent. Al Quaeda ? Le FLNC canal dauphinois ?
Il n’y avait plus de « membres du gouvernement » à la MC2, jeudi 13 à
18 heures, quand les gendarmes en tenue de maintien de l’ordre ont
dégagé le parvis et repoussé les opposants derrière des barrières. Et
l’on ignore encore qui avait réclamé cette « surveillance à l’entrée »
: Armanet ? Destot, maire de Grenoble ? Morin, préfet de l’Isère ? Mais
tout le monde a pu voir, y compris l’envoyé de Politis (20/09/07), que
derrière le groupe des vigiles, les Renseignements Généraux et la
Brigade Anti-Criminalité éjectaient toute personne connue et fichée
pour ses engagements, et beaucoup d’autres qui n’avaient que le tort
d’une mine éveillée ou d’une mise originale. « Vive la politique ! »
vous dit-on.
Quant aux « incidents mineurs », Armanet et Joffrin sont incapables
d’avouer à leurs lecteurs qu’ils ont refusé l’entrée de leur barnum aux
membres de la « Société des Lecteurs de Libération », dont Zina
Rouabah, ex-directrice du journal, et Mikael Garnier-Lavalley, l’un des
secrétaires de ladite société, étranglé, éjecté, et brièvement
hospitalisé.
Cet intéressant jeune homme ayant quelque lien avec Clémentine Autain,
elle-même invitée par Libération à pérorer sur « la gauche moderne »,
celle-ci publia sur son blog un billet finement intitulé « Libé, pas
très libéré… » mais comme cette « gauche moderne » ne veut pas insulter
un avenir qu’elle s’imagine brillant, elle a vite retiré son persiflage
pour ne pas se brouiller avec « Libé ». Il n’en reste que quelques
commentaires de « groupies ». (Voir :
http://clementineautain.fr/2007/09/17/Libe-pas-tres-libere/)
Il paraît que cette Société des Lecteurs fondée il y a un an, à
l’instigation de journalistes de Libération, alors « au cœur de sa
crise économique », a depuis collecté « près de 150 000 € auprès de
quelque 5000 adhérents ». (Politis, 20/09/07) Quand on additionne les
trésors de pécune et de soutien que Libération a su extorquer à ses
lecteurs depuis 1973 pour toujours flouer leurs attentes, il y a de
quoi se taper sur les cuisses, mais après tout si ces gens-là, non
contents d’être cocus, veulent encore être battus, on ne mettra pas le
doigt entre l’échine et le bâton.
Dans cette même double page d’autocongratulations, le lendemain du
barnum, figure une interview de Laurence Bloch, directrice adjointe de
France Culture, par Béatrice Vallaeys, de Libération, et dont le
contenu dément le titre : « Le duo échappe à la langue de bois » On
mesure le risque qu’il y a à interroger les co-organisateurs d’une
manifestation pour s’en faire une opinion distanciée. Laurence Bloch,
quelle surprise, est revenue « enthousiaste et confortée » du barnum
Libération. Gageons que Béatrice Vallaeys pourrait tout aussi bien se
déclarer « confortée et enthousiaste » sur les ondes de France Culture.
« Nous associer à Libération pour ce forum citoyen nous intéressait car
vous repreniez des thèmes que nous traitons toute l’année notamment
dans l’émission Du grain à moudre. » On ne peut mieux dire qu’au vu des
sujets et des duettistes, on n’échapperait pas au radotage médiatique.
« … mais votre coup de génie a été de concevoir ce forum sur des têtes
à tête. » Leur coup de génie a été de décentraliser en province, et en
« live », une antique émission de télévision intitulée « A Armes égales
». On voit la participation « citoyenne » à la mode altermondialiste.
« Je crois qu’il est important de parler de ceux (difficile d’en
estimer le nombre), qui auraient voulu que ce forum tourne court. Je ne
sais pas comment les qualifier – disons des militants d’extrême gauche,
des anarchistes – qui ont ceci en commun : ils ne supportent pas l’idée
que des « contraires » - des gens qui ne partagent pas les mêmes
opinions – puissent discuter. »
1) Il ne s’agissait pas d’un « forum », où n’importe quel imbécile a
droit à la parole, et ne s’en prive pas, mais de talk-shows en duo
devant des spectateurs.
2) Il est facile d’estimer le nombre de ceux qui ont voulu ce barnum :
une demi-douzaine de nomenklaturistes de Libération et Radio France,
plus trois élus du PS, maire de Grenoble (Destot), président du conseil
général de l’Isère (Vallini), et président du conseil régional
Rhône-Alpes (Queyranne).
3) Les seuls « contraires », à soutenir des opinions différentes de
celles de Laurence Bloch manifestaient précisément dehors, devant la
MC2. Les débatteurs du barnum, à quelques vénérables (Morin/Lefort) et
bibelots près (Autain, Massiah), s’opposent autant que deux factions du
juste milieu.
« Ils étaient à Grenoble (ndr. L’extrême gauche, les anarchistes), et
c’est indiscutable, il y avait une forte présence policière. Le vrai
problème, est de savoir comment on peut les ramener à ce que je
considère comme de la véritable démocratie : on n’est pas d’accord et
pourtant on parle. Ces gens pensent que pour se faire entendre ils
doivent en passer par la force. Ils ne veulent pas discuter mais
imposer leurs points de vue. C’est une pensée totalitaire qui n’écoute
pas ce qui peut la contredire. »
Non, Laurence Bloch, ils n'étaient pas à Grenoble, nous sommes
Grenoblois et vous étiez à Grenoble, avec, c’est indiscutable, une
forte présence policière. Et il est comique d’entendre une apparatchik
de votre rang flatuler sur la libre confrontation des points de vue,
alors que vous avez censuré en 2004 sur France Culture « Les yeux
grands fermés », une série de reportages qui vous dérangeait. Discuter
avec nous était la chose la plus facile du monde. Encore eût-il fallu
vous aventurer hors de votre bunker, sur le parvis de la MC2, où nous
sommes restés trois jours à discuter avec votre public.
Nous avons tenu le vendredi 14 septembre une réunion publique largement
annoncée, avec des membres de CQFD, du Plan B, d’Indymedia, et de
Pièces et Main d’Œuvre. Quatre-vingt-dix personnes y ont participé, et
tous ceux qui ont voulu la parole ont pu la prendre. Vous ou n’importe
quel de vos congénères de Radio France et de Libération aurait pu y
assister, écouter, s’informer. Nous n’avons encore jamais dépecé ni
dévoré personne. Mais vous et vos semblables n’avez ni cran, ni
curiosité, ni vivacité. Vous êtes incapables, comme nous l’avons fait
maintes fois, de défendre vos convictions devant une salle hostile.
Vous n’êtes certes ni des militants, ni des journalistes, mais la
volaille qui aimerait faire l’opinion, et qui s’indigne de ne pas
tout-à-fait y réussir. Que la peste aviaire vous emporte.
Service Compris
Grenoble le 21 septembre 2007