Lu sur
L'asile utopique : "Dans le domaine de la sexualité, je ne connais que deux mots : amour et viol.
Soit les gens s'aiment, et aiment ce qu'ils se font – ou aiment ce qu'ils se font sans nécessairement s'aimer ni très fort ni très longtemps – et on est dans le domaine de l'amour, soit l'un d'entre eux n'aime pas ce qu'on lui fait et on est dans le domaine du viol. Toute négation de l'autre, de sa liberté, de son désir, que ce soit par l'usage de la force, de la menace, de la nécessité, de la supériorité ou de la dépendance, qui aboutit à une relation sexuelle est un viol. Il y a viol si l'une des personnes n'aime pas ce qu'on lui fait, quel que soit le mode de coercition (physique, économique, psychique, légal – matrimonial – ou autre)
Par contre, quand il y a amour tout est possible puisque les gens aiment ce qu'ils se font, quoi qu'ils fassent, et qu'il n'y a pas de perversion. Je ne dirai même pas que dans le domaine de l'amour toutes les sexualités sont possibles et respectables tout simplement parce qu'il n'y est en fait plus question d'hétérosexualité, de sodomie, d'ondinisme, d'homosexualité, de cunilinguisme, de masochisme, de gérontophilie, de congressisme, d'onanisme, de fellation, de travestisme, de satyriasisme... Il n'y a que la sexualité ; tout court, celle que les partenaires vivent à cet instant là parce que c'est celle-là qu'ils veulent vivre à cet instant. Ces mots ne sont plus alors que les catégories vides de sens des normateurs pour qui la sexualité ne relèvera jamais de la rencontre d'individus libres, de sentiments libres, de désirs libres. Mais la pédophilie fait-elle aussi partie de ces catégories vides de sens ?
L'approche libertaire, c'est à dire l'approche en terme de respect de toute liberté, suffit. La sexualité de l'enfant appartient à l'enfant, ET C'EST TOUT. La sexualité de cette période de la vie est faite d'interrogations et de découvertes. Quand un adulte s'en mêle, c'est avec ces interrogations et ces découvertes réglées, et réglées à sa façon. Or une relation, et il s'agit bien sûr d'une relation d'amour (sinon on est bien évidemment dans le domaine du viol) ne peut se faire qu'une fois ces étapes franchies par chacun des partenaires. Tant qu'elles ne le sont pas, que ce soit à 15 ans, le lendemain ou la veille de la majorité édictée par la loi ou à 30 ans passés, il s'agit là encore d'un viol, qu'on l'appelle ou non pédophilie. Mais comment savoir que ces étapes sont franchies ? J'ai écrit une relation d'amour : aimer, c'est être attentif à l'autre et être anarchiste, c'est être attentif à la liberté, c'est à dire ne pas prendre ses propres désirs pour les désirs de l'autre ; dans la sexualité comme dans l'organisation sociale...
Dessin d'Anne-Laure
Quand à utiliser les catégories normatives évoquées plus haut pour injurier, stigmatiser, marginaliser ou condamner, il faut vraiment avoir en tête l'ordre moral de la religion et de la société d'oppression pour voir une injure ou un vice – ou en tout cas un prétexte à exclure – dans un acte d'amour, quel qu'il soit. Jamais je ne dirai à un être que je déteste "va te faire... (au choix, selon le fantasme de chacun)". Au contraire ! Qu'il s'étiole de désespoir dans la solitude définitive de son intimité à jamais désertées et qu'on me laisse souhaiter à ceux qui me sont sympathiques toutes les ressources de l'imagination pour exprimer leurs désirs et leur amour.
La sexualité, c'est cet espace unique et magique où l'individu se réalise pleinement dans ce qu'il a de plus irréductiblement intime dans et par l'échange avec d'AUTRES uniques se réalisant eux-mêmes. Pas étonnant que cette magnifique rencontre entre l'individualisation absolue et le partage total de libertés pleinement autonomes effraie et indigne les prêtres, les magistrats et tous les suppôts de l'oppression. Pas étonnant non plus que ceux-ci reçoivent toujours la complicité directe ou indirecte des pisse-froid et des peine-à-jouir.
Jean, Marie-Hélène, Claude, Roselyne, Dominique, Floréal, Hugo...
Malgré la signature plurielle, ce texte est rédigé au singulier car dans ce domaine plus qu'en aucun autre, chacun est absolument un individu particulier"