Les deux terme sont souvent accolés l’un à l’autre, soit même présentés comme synonymes. D’une certaine manière ce n’est pas faux, mais encore faut-il s’entendre sur le
sens exact que l’on donne à ces deux termes… et surtout, quelle est la
stratégie qui les fait se compléter.
Les quiproquos, même s’ils sont involontaires, ce qu’ils ne sont pas toujours, entretiennent un
flou politique qui dénature les deux notions.
ECOLOGIE ET SYSTEME MARCHAND
L’alerte écologie a été sonnée lorsqu’il est apparu évident que l’activité de l’homme portait une atteinte irrémédiable aux équilibres naturels. Le phénomène n’est pas nouveau… dans toute son Histoire l’homme a été un prédateur, ou plutôt un destructeur, plus ou moins irresponsable de la Nature et certaines civilisations ont probablement disparu suite à ce type de comportement (Ile de Pâques, civilisation Maya du Guatemala,…).
L’ère industrielle, par la puissance des moyens mis en œuvres, les
forces productives diront certains, a démultiplié les
atteintes aux équilibres naturels par le pillage sans limite des ressources
naturelles, le développement prodigieux des pollutions.
Or, l’ère
industrielle n’est pas, comme tout mode de production, une
organisation de
fait, mais une
construction sociale fondée sur des principes de
fonctionnement. Ce sont ces derniers qui fondent les pratiques entre les
hommes, mais aussi les rapports entre eux et la Nature.
Très vite le lien
a été fait entre les phénomènes de dégradation observés et les conséquences du
fonctionnement du système économique marchand qui a développé de manière
illimitée ces
forces productives..
Après quelques déclarations
tonitruantes, rapports bien sentis et colloques à grand spectacle ( le premier
rapport faisant état de ces fait date de la fin des années 1960)… tout est
redevenu comme avant… Par exemple, il est exclu de remettre en question la sacro
sainte
croissance économique dont tout le monde sait quelle est non
seulement économico-humainement absurde (la pauvreté croit malgré sa
progression), mais écologiquement catastrophique,… de même que la concurrence
effrénée et absurde entre grandes sociétés pour le profit, source de gaspillages
inouïs, n’est pas remise en question mais au contraire encouragée…c’est le
fondement même de la pensée libérale.
Ceux qui avaient, pendant des
décennie, impulsé une activité économique qui devait aboutir à la catastrophe
actuelle, se sont soudainement mués, pour les besoins du système, en apôtres
verdoyants d’un
écologisme d’opérette du plus bel effet dans les médias
complaisants. Et, ne joignant surtout pas le geste à la parole, ils ont continué
à soutenir en sous main ces pires politiques économiques destructrices de
l’environnement
ECOLOGIE FORCEMENT
POLITIQUE
Vouloir «détacher», considérer, l’
écologie,
c'est-à-dire le soucis des équilibres naturels indispensables à la vie sur la
planète, comme quelque chose d’indépendant des lois du fonctionnement du système
économique dominant est évidemment une erreur fondamentale, voire, si c’est
volontaire, une escroquerie. L’écologie est forcément politique, au
sens
noble du terme.
Pourquoi préciser,
au sens noble du terme?
Parce qu’elle peut être considérée au
sens vulgaire, c'est-à-dire comme
un alibi à un discours dont l’aboutissement est l’absurde et démagogique
développement durable, c'est-à-dire l’auto justification du système en
donnant l’illusion que l’on tient compte des conséquences de son fonctionnement
sur la Nature.
Reste à élabore une
stratégie politique fondée sur
la prise de conscience écologique.
La prise de conscience écologique
n’est en fait qu’un élément supplémentaire de la critique du système
marchand. Le risque est de le surajouter aux stratégies classiques prônées
par les organisations politiques traditionnelles,… et c’est exactement ce qui
c’est passé et ce qui ce passe… d’autant plus que tout se passe au niveau du
discours. Avec l’aide de quelques bouffons médiatiques, souvent produits plus ou
moins dérivés des grands pollueurs de la planète, les organisations
traditionnelles se sont emparées de la question, l’ont intégrée à leur discours
et de ce fait, en ont complètement dénaturé le
sens.
Quant aux
écologiques «pur sucre», leur «pureté», sincère, du début a laissé la place à
une soif inextinguible de pouvoir… Ils ont suivi le mouvement et ont perdu leur
crédibilité en échange de quelques postes ministériels, de députés et/ou de
sénateurs. Comme les «grognards» de la Grande Armée, «
ils râlent mais ils
marchent».
Il n’en reste pas moins que la question de fond demeure
posée et que toutes les stratégies actuelles dans le domaine de l’écologie sont
vouées à l’échec… la preuve en est l’aggravation dramatique de la situation de
la planète malgré toutes les déclarations, forums, assises, conférences,…
promesses.
C’est donc bien à un niveau beaucoup plus fondamental, celui
des
rapports de production, qu’il faut agir pour inverser la tendance…
niveau qu’aucune organisation politique traditionnelle ne veut, bien entendu,
aborder soit par opportunisme, sectarisme, bureaucratisme, incompétence, voire
bêtise pure et simple… souvent tout cela à la fois.
UNE
ALTERNATIVE ECOLOGIQUE
L’écologie ne peut qu’être
alternative.
L’
alternative ne peut pas être
«éventuellement»
écologique, elle l’est fondamentalement. Pourquoi? parce
qu’elle remet radicalement en question les principes du fonctionnement marchand
qui sont à l’origine des désastres écologiques de ce dernier
siècle.
Mettre en place, ce qui est justement le fondement et la raison
d’être de l’alternative, des structures en rupture avec l’absurde course au
profit, concurrence, pillage et gaspillage des richesses naturelles, c’est
renouer avec un rapport à la nature qui, tout en réhabilitant et en instaurant
des rapports éthiques entre les individus, fait coïncider ce rapport avec un
nouveau type de relations sociales. Concrètement c’est ce que l’on vit dans
l’agriculture dite «alternative» ou du moins dans sa branche qui établit de
nouvelles relations producteurs-consommateurs dans un acte de production qui
banni le recours aux procédés de l’agriculture industrielle.
Ce n’est
que dans ce type de rapport que l’
écologique peut être pris en
considération.
Autrement dit, écologie et alternative sont parfaitement
complémentaires dans la stratégie politique à mettre en place.
Faire une
profession de foi écologique sans poser la problématique du changement
des rapports sociaux est complètement stérile:
- -
soit parce que l’on reproduit les rapports
existant et que l’on conserve ainsi les causes des déséquilibres écologiques… ce
que font toutes les organisations politiques officielles
- soit parce que l’on pose la question
écologique indépendamment du changement social, simplement sur le plan de la
culpabilité («
il faudrait que…» ou
» il ne faut pas…»),… ce
que font les écologiques «apolitiques»
La question écologique
en
soi n’a aucun sens. Par exemple, poser la question de la
décroissance
en soi aboutit, soit à une incompréhension de celles et ceux à qui on
s’adresse et qui y voient une
gentille utopie… ce qui est généralement le
cas, soit à une question butoir pour le système marchand qui ne peut envisager
une telle solution.
Avancer dans la question écologique c’est
donc avoir une pratique sociale ce qui limite les récupérations par le système
-, une
praxis, qui montre que de nouveaux rapports peuvent concrètement
se mettre en place et commencer ainsi à répondre aux grandes questions
écologiques qui se posent: rythme de la production, engrais, pollution, rapports
nouveaux producteurs-consommateurs, détournement des circuits marchands
classiques et structures alternatives,…affaiblissant ainsi le système marchand
au bénéfice de nouvelles structures expérimentées et assumées par de plus en
plus de monde.
En dehors de cette problématique on se condamne à
l’impuissance politique, à la collaboration et dans le meilleur des cas à
l’incantation.
Patrick
MIGNARD
Voir aussi les articles:
«
CROISSANCE, QUELLE
CROISSANCE?»
«
DECROISSANCE, QUELLE DECROISSANCE?»