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L'En Dehors


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Tirer, treuiller, pousser, chaîner, pelleter
DU 24 AU 28 JANVIER se tenait dans les Hautes-Alpes la 29e édition. de la Croisière Blanche, manifestation motoriste hivernale majeure en Europe. La rencontre propose 300 km de pistes à 850 participants, répartis en 400 véhicules (4x4, quads et motos). Même Jean-Pierre Pernault, dans le journal télévisé le plus suivi de France, a relaté l'événement.


Dans les journaux locaux, on nous présente les participants comme un sympathique panel de Français moyens, du dentiste parisien au plombier normand, jeunes ou vieux, « venus pour les galères », mais aussi pour « l'entraide, l'amitié, la mécanique et la nature ». Mais leurs interviews révèlent que ce qui éclate par-dessus tout nos motoristes de la France d'en bas ou d'en haut (voir ML 1422), c'est de rester coincés dans les ornières et faire patiner à mort leurs 4 monstrueux pneus chaînés (vas-y, fait une photo avec le nuage de neige) ou de se renverser dans les fortes pentes neigeuses et de rester se geler à côté de leur 4x4 en attendant les bénévoles ou d'autres participants « patients et habiles », jaloux de n'avoir pas encore réussi à se planter. Tirer-treuiller-pousser-chaîner-pelleter, voilà qui apparaît comme l'essence de ce sport, pas du tout macho d'ailleurs, comme nous l'apprend l'unique équipage féminin: « on a la plus petite voiture de la catégorie, mais ces messieurs nous chouchoutent. »
Enfin, pour ceux qui trouvent que, ça galère pas encore assez, ils ont créé le groupe extrême: au lieu de rentrer tranquillement à (hôtel en passant par le resto, comme les autres participants, les . endurcis-qu'ont-peur-de-rien vont se paumer dans la montagne à plus de 1500 mètres d'altitude pour manger du réchauffé par 15°, avant de rentrer dans leur tente (autour d'une yourte, au cas où). Bientôt, on proposera des week-ends SDF pour bourgeois en mal de galères.
Car s'ils arrivent à nous émouvoir avec le prolo en vacances, les frais d'inscriptions sont tout de même importants (375 euros par personne à l'avant, et 155 corps pour les autres), ceci bien sui hors repas et logement en station de ski, sans compter le transport. De plus, les reconnaissances débutant le samedi, les concurrents sont fortement incités à être présents trois jours plus tôt (ça tombe bien, les locations sont du samedi au samedi). On nous précise alors rapidement que les étrangers (ici des gens bien qui achètent des résidences secondaires) représentent 25 % des inscrits, sans nous indiquer que, s'ils sont si nombreux, c'est que ce genre de maniféstation est tout simplement interdit partout ailleurs en Europe. Ceci explique l'immense filé de 4x4 de ville à peinture métallisée, auquel est attachée la remorque transportant les engins, dont des 4x4 (quads et motos tout terrain n'étant pas tous homologués).
Car ne nous y trompons pas, cette course n'est qu'une manne financière en période touristique creuse, et les 850 participants, souvent accompagnés de leur famille préférant aller skier (ça tombe bien, l'hôtel est au pied des pistes) sont une véritable aubaine pour les deux vallées.
Comment, dans ce cas, douter que le préfet ne délivre l'autorisation dérogatoire exceptionnelle nécessaire à la course, qui se déroule sur pistes forestières fermées à la circulation, et ce alors que la ministre de l'Environnement, défavorable à (événement, a précisé par circulaire à tous ses pairs les modalités d'application de la loi de 1991 (limitant les déplacements motorisés dans les espaces naturels sensibles). Comment les 23 maires des communes concernées auraient pu décider d'exclure leur village du tracé de la course. Enfin, comment l'ONF et le Conseil supérieur de la pêche, dont les recommandations n'ont pas été suivies, pas plus que celles du Parc national des Écrins, auraient pu faire blocus (le parcours passe en effet dans un village enclavé et emblématique, porte du Parc).
Car c'est la pression de deux vallées, reculées et peu peuplées, qui s'exerce. La montagne, ils en vivent, comme le dit sans complexe l'organisateur de la course. D'ailleurs, les militants anti-Croisière blanche subissent des pressions, style pneus crevés et insultés téléphoniques. Mais cette année, pas de risque, le préfet ayant « demandé » aux maires des communes concernées de prendre un arrêté interdisant le parcours à toutes personnes étrangères à la course, supprimant ainsi tout risque de manifestation, mais aussi de surveillance citoyenne. En échange, il a émis des prescriptions limitant quelque peu les dégâts, dont un état des lieux comparatif au printemps, de toute façon sans valeur car effectué par les élus partiaux et les organisateurs eux-mêmes, et ce à trop court terme. Au nom de l'argent, on en arrive donc à autoriser les véhicules motorisés dans des espaces protégés réservés aux piétons, que l'on interdit à ces derniers.
Pourtant, la trentaine d'associations regroupées contre la Croisière blanche peinent à convaincre et mobiliser la population (une centaine de personnes rassemblées devant la préfecture, une trentaine sur place), même si l'importante subvention accordée par le conseil général a été diminuée de moitié deux années consécutives. Les organisateurs peuvent donc tranquillement déborder du cadre de la dérogation en organisant des reconnaissances et en incluant des sentiers piétons dans les tracés quads et motos, alors que la dérogation est accordée sur base de chemins forestiers. Tant que l'argent rentre, on peut bien fermer les yeux.
Au-delà du caractère « sportif » de cet événement, les organisateurs offrent une immense vitrine publicitaire dont le but est de vendre toujours plus de véhicules, tels que les 4x4 dits « de ville » pour un semblant « d'aventure citadine ». Leur médiatisation, permanente, en particulier lors de rassemblement comme la Croisière blanche, font croire au grand public qu'il est tout à fait normal de sillonner la montagne avec de tels engins. Les jeunes sont particulièrement perméables à cette glorification des loisirs mécaniques. Nous retrouvons d'ailleurs de nombreux motoristes dans des zones sensibles en toute illégalité, notamment en été, sans parler des virées sauvages dans les chemins de terre en communes rurales.
Ces pratiques consacrent également l'appropriation de fait d'un patrimoine commun pour le divertissement et l'enrichissement de quelques-uns (marchandisation des espaces naturels à des fins privées). À l'heure où se confirme la perspective de dérèglements climatiques, ces pratiques voraces en carburant sont un encouragement des plus provocateurs au non-questionnement sur nos pratiques en terme de consommation énergétique et d'impact sur l'environnement. Encore une fois, un gros gaspillage pour un peu d'amusement aura été la règle.
En dépassant ce simple événement local qu'est la Croisière blanche, nous pouvons nous interroger sur tous les autres événements motorisés de masse hors de, nos frontières, tels que le « Paris-Dakar». Ce qui sera un jour, nous l'espérons, interdit en France, risque d'être exporté à l'étranger.
S'il y a peu l'Enduro du Touquet a été modifié pour protéger les dunes du littoral français, les terres africaines ne semblent pas en valoir autant. En prenant pour terrain de jeu des pays étrangers, les Occidentaux agissent comme des néocolonisateurs..
Malgré plusieurs voix, notamment africaines, qui s'élèvent contre cette compétition d'un autre âge, le Dakar reste organisé par des sponsors français, avec un brin de nostalgie de ce temps révolu des colonies, les habitants étant ravalés au rang de décor exotique pour individus en manque de sensations.
De plus, les médias ont pris l'habitude d'ériger les pilotes en aventuriers des temps modernes: quand l'un d'entre eux se tue, il convient d'y consacrer trois pages alors que quand une fillette est renversée, elle restera anonyme, seules quelques lignes laconiques lui étant consacrées.
Le Dakar a encore tué impunément, car les chauffards du désert qui ont arraché la vie à ces enfants ne seront sans doute jamais poursuivis par la justice. Les organisateurs feront juste un peu d'humanitaire hypocrite en allant rendre visite à des parents déboussolés et meurtris, qui seront vite abandonnés à leur misère, leur pauvreté et leur solitude; ou distribueront quelques babioles sous le regard complice des caméras des grandes chaînes de télévision, surtout préoccupées par l'audimat et les revenus publicitaires.
Bien sûr, ce n'est que l'ébauche d'une réflexion plus globale à approfondir: comment organiser le transport utilitaire et de loisir à l'échelle mondiale sans nuire à nous-mêmes et à notre environnement, pour les générations futures. Nous ne parlons pas ici d'un développement durable qui implique toujours plus de croissance capitaliste, mais bien de décroissance.


Guénaël, Hélène; Nicolas

Guénaël, Hélène, Nicolas militent au groupe GEL -05 de la Fédération anarchiste, en Hautes-Alpes.

Le Monde libertaire #1427 du 23 février au 1er mars 2006
Ecrit par libertad, à 22:31 dans la rubrique "Ecologie".

Commentaires :

  Anonyme
09-03-06
à 08:48

'En prenant pour terrain de jeu des pays étrangers, les Occidentaux agissent comme des néocolonisateurs.."

Idem des voyageurs/touristes...

Le Tibet est le terrain de jeu de la chine, le monde pauvre celui de l'occident...
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