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Directive Bolkestein - Pour nous, c’est encore non !
--> Continuer le combat
Lu sur A voix autre : "Ce jeudi 16 février, le Parlement européen a approuvé la directive Bolkestein. De l’hôtellerie à l’approvionnement en eau, c’est près de 70 pour cent de l’économie de l’Union qui viennent d’être "libéralisés".
Ce jeudi 16 février, le Parlement européen a approuvé en première lecture la directive "Bolkestein" sur la libéralisation des services par 394 voix contre 215 (et 33 abstentions) [1]. Plus qu’une gifle, c’est une insulte aux 100.000 travailleurs qui ont rejeté ce projet le 19 mars 2005, lors d’une manifestation monstre dans les rues de Bruxelles. Et une autre aux 40.000 manifestants qui, mardi 14 février à Strasbourg, ont redit non à ce texte litigieux, dans toutes les langues d’Europe.

Le texte approuvé par le Parlement est certes un compromis, négocié entre l’aile socialiste et l’aile conservatrice de l’assemblée, mais le texte est néanmoins passé. Epoustouflant...

La proposition, ancienne version, avait été rejetée par la population, et (de surcroît) par le Parlement européen et par certains Etats-membres... Peu importe, la Commission européenne l’a réintroduite. Cette technique révèle une étrange conception de la démocratie... Il est plus que temps de gérer nos affaires nous-mêmes.

Le retrait pur et simple de cette directive était-il envisageable ? La réponse tient en peu de mots. Dès la levée de bouclier, Bruxelles a souhaité trouver des "solutions" pour la faire adopter car "la position de la Commission est que la libéralisation des services est un point essentiel de la relance de la stratégie de Lisbonne sur la compétitivité de l’Union. Il n’est pas question que la Commission retire la directive Services", comme l’a expliqué une porte-parole de la Commission en février 2005 [2].

Un mauvais texte amendé reste mauvais
La directive Bolkestein entend libéraliser les services, y compris les services publics, autrement dit elle veut permettre leur libre-circulation au sein de l’Europe en supprimant les entraves à la concurence. Ce qui revient à lever les "entraves" administratives, les législations sociales, fiscales ou environnementales jugées trop exigeantes. [3]

De l’hôtellerie au secteur de la construction, rien moins que 70 pour cent de l’économie européenne sont concernés par cette directive ! Mais les services culturels et environnementaux sont également touchés par la libéralisation ; sans parler des services postaux, de la fourniture d’eau ou celle de l’énergie. [4]

Le compromis négocié entre le groupe socialiste et le groupe conservateur du Parlement européen a supprimé la référence au "principe du pays d’origine". Néanmoins, bien que "formellement retiré de la directive", le principe du pays d’origine "demeure la clé de voûte de la stratégie de la Commission européenne", comme l’ont rappelé des eurodéputés socialistes français. [5]

Pour rappel, à travers la notion de "pays d’origine", la directive ouvrait largement la porte au dumping social. Une telle notion impliquait en effet que les entreprises prestataires de service n’auraient dû respecter que les lois du pays dans lequel elles sont établies. Autant dire que les mutinationales auraient choisi le pays le moins exigeant sur les plans social, fiscal et environnemental entrainant un nivellement par le bas des conditions de vie des travailleurs européens... [6]

Le compromis adopté ce jeudi 16 prévoit que les Etats de l’Union garderaient le droit de restreindre l’accès à leur marché pour des raisons de sécurité publique, de protection de l’environnement, de santé publique [7]. Cependant, les références à la politique sociale et à la protection des consommateurs ont été retirées [8], ce qui en dit long sur ce qui nous attend. En ce qui concerne les restrictions, l’histoire récente de l’Union nous montre qu’elles seront rapidement mise à mal par de nouveaux textes libéraux.

Si le texte a été modifié, c’est grâce à la pression de la rue. La mobilisation de 140.000 manifestants n’aura pas été totalement vaine.

Mais pour nous, un mauvais texte, même amendé, reste un mauvais texte. Nous exigeons son retrait définitif.

Internationaliser la solidarité
Patronat et gouvernements européens, de gauche ou de droite, poursuivent leurs attaques contre les conditions de vie. Les privatisations du secteur public se multiplient un peu partout en Europe. Les plans sociaux s’accompagnent d’une politique de précarisation et de flexibilité, avec la remise en cause des allocations de chômage, de la Sécurité sociale et du système des retraites.

En Belgique, aux Pays-Bas, en Italie, en Grèce, des travailleurs ont mené des grèves générales face à ces attaques en règles. Mais ils ont cédé trop vite, le mouvement n’était pas assez large... De leur côté, les dockers ont laissé éclaté leur colère en janvier à Strasbourg face à la directive sur la libéralisation des services portuaires et ont marqué des points puisque le Parlement européen s’est aligné sur leur revendications en votant le retrait du texte litigieux.

Peut-on compter sur les socialistes de gouvernement ? Rien n’est moins certain. Pour mémoire, le 13 janvier 2004, neuf socialistes siégeaient parmi les vingt commissaires qui ont approuvé la directive, à l’unanimité. Ils "auraient pu bloquer Bolkestein en empêchant la majorité qualifiée. Il n’en a rien été." [9] A ce niveau politique, on ne peut plus invoquer un manque d’analyse du projet économique de l’Union. Leur silence en dit long sur l’élargissement du fossé entre les décisions des dirigeants et les besoins de la population

Alors ? Alors, investissons nos centrales syndicales, nos associations. Et internationalisons notre solidarité : il faut aider les salariés les moins protégés à obtenir très rapidement les avantages sociaux que nous avons déjà acquis. Ensuite, il faudra abolir le salariat qui maintient l’exploitation et les jeux de pouvoir, mais ça c’est une autre paire de manches.

Au travail comme dans nos loisirs, défendons nos revendications pour l’égalité économique et sociale, pratiquons l’autogestion. Et contrôlons nos délégués par des mandats précis et révocables. Parce qu’il est temps de partager le travail et les richesses, de garantir à toutes et tous l’accès libre et gratuit aux soins de santé... Pare qu’il est temps de changer la société, sans prendre le pouvoir.

La directive va être transmise à la Commission, puis le Parlement européen se penchera dessus en seconde lecture. Elle sera d’application deux ans après son adoption définitive, c’est-à-dire en 2009 ou en 2011. D’ici-là, continuons le combat.

Nous produisons tout : tout est à nous !

[Louise]

[1] La Libre Belgique du 16 février 2006

[2] La Libre Belgique, d’après AFP, du 4 février 2005

[3] Syndicats du 27 janvier 2006

[4] Le Monde du 16 février 2006

[5] La Libre Belgique du 14 février 2006

[6] Syndicats du 27 janvier 2006

[7] La Libre Belgique du 14 février 2006

[8] La Libre Belgique du 16 février 2006

[9] La Libre Belgique du 4 juin 2004
Ecrit par , à 22:23 dans la rubrique "Actualité".



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