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L'En Dehors


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Technophobie/-- Les Cercles sur le Lac
Lu sur Vidange : "J’étais en train de parler avec une personne à propos des responsabilités vis-à-vis des problèmes de l’environnement, et celle-ci me faisait remarquer que, si chaque fois que nous allumions la lumière, nous nous souvenions qu’il y a une entreprise avec ses réseaux hautement polluants derrière ces câbles électriques (il est désormais démontré que les champs électromagnétiques sont responsables de certains types de cancers), que ces réseaux transportent une énergie avant tout produite à partir de centrales nucléaires ou de centrales thermoélectriques, que le nucléaire est éternellement nuisible (rien qu’en pensant au retraitement des déchets), que l’autre quantité consi-dérable d’énergie utilisée est basée sur la guerre du pétrole, sur l’occupation de territoires par l’Occident et le massacre de populations entières ; si chaque fois qu’un geste aussi maladroitement quotidien déchaînait devant nos yeux des images de cette violence, peut-être préférerions-nous devenir aveugles. Ou le sommes-nous déjà ? Sommes-nous devenus si inconscients que nous ne pouvons plus être maîtres des conséquences de nos actions, que nous n’avons pas non plus la volonté ou la possibilité de les connaître ?


Le rayon personnel de la conscience directe de mes actions (qui concernent « le problème des déchets ») se limite précisément à ce point-là : de l’acquisition d’un produit (par exemple alimentaire) à sa consommation, jusqu’à la production de déchets. Tout au plus, quelqu’un me dira si je peux réunir toutes les ordures dans un sac, ou m’expliquera où je dois les mettre parmi les dix poubelles prévues à cet effet. A partir de là, mieux vaut tout oublier, ma conscience s’efface, ce n’est plus mon problème.
Comme une pierre jetée dans le lac et dont les cercles s’élargissent toujours plus, mon regard et mon attention ne peuvent qu’en comprendre quelques-uns au fur et à mesure que la distance se fait plus grande du centre, là où j’ai lancé ma pierre. Cette distance qui n’est pas couverte lorsque nous ne réussissons plus à voir, lorsque nous perdons la conscience des conséquences de nos actes, nous ne nous demandons pas non plus où elle mène (dans l’arc du temps, l’axe de l’espace) : elle devient le territoire où interviennent la spécialisation et la technologie, où se meuvent les techniciens, les experts et les savants.
Ceux qui expliquent à grande voix dans les journaux, les revues spécialisées et les télévisions que nous vivons entassés comme des puces sur un chien, que nous habitons une planète au bord de la rupture, que nous produisons des montagnes de déchets si hautes que même Messner ne réussirait pas à les gravir, ceux qui soutiennent que « les chiffres sont si élevés », que « ...les coûts et les bénéfices… », que « …les dégâts et les maladies… », que « …les statistiques et les morts… », qu’on ne peut contrôler le hasard, que « la technologie nous sauvera mais qu’il faut avoir confiance » (ou la foi ?), ceux qui parlent avec des nombres et répondent avec des chiffres, qui n’écoutent que ceux qui parlent leur langue, pour lesquels nous ne comptons que comme un mort de plus ou de moins, ceux qui hurlent qu’« il y a besoin de l’incinérateur(1) ou qu’alors nous sommes tous stupides et aveugles ».
En effet, lorsqu’on s’égare dans un rapport constructif avec l’environnement dans lequel nous habitons, n’importe quelle fable revêtue de nombres et de paroles incompréhensibles pourra nous sembler crédible, comme n’importe quelle formule qui explique comment nous préserver du désastre que nous sommes en train de créer, à force de consommer et de jeter.
Et puis, en somme, les experts sont invités partout où il manque un peu de bon sens, partout où la discussion doit garder les pieds sur terre, dans une ambiance rassurée et sereine avec ce sourire que seuls peuvent afficher ceux qui ont trouvé la vérité dans les mathématiques… C’est vrai qu’ils nous font sentir un peu ignorants, que parfois on ne comprend pas vraiment ce qu’ils disent…, mais ils sont ensuite aussi disposés à traduire ce qu’ils disent au petit peuple, ils inventent alors des exemples que vraiment tout le monde est à même de comprendre !


Mais lorsque nous sentons, entre confusion et timidité, un vague doute face à leurs tableaux, lorsqu’on suspecte un peu que derrière les nombres il y a des chiffres qui comptent bien plus – ils se nomment euros ou dollars –, eh bien le voile commence alors à se lever. Ce n’est pas un hasard si nous distinguons des hommes corrompus derrière les blouses immaculées, payés pour interpréter des chiffres qui pourraient être lus d’une autre manière, payés pour occulter les statistiques aux résultats dérangeants, pour rechercher des preuves alimentant des théories discutables ? Oui, mais discutables par qui ?
Ainsi, préoccupés qu’ils sont de n’avoir pas de moyens adaptés pour répondre à ces experts, les comités et associations invitent habituellement d’autres experts, qui ne se sont pas vendus au premier imprésario(2) venu. Pour ces bons spécialistes, il est aussi nécessaire que les savants ne dialoguent qu’avec d’autres savants (ou s’accusent ou s’insultent, selon l’occasion). Et nous ? Nous écoutons avec intérêt et espoir quelqu’un qui nous donne d’autres chiffres et d’autres interprétations, qui nous explique dans un langage plus compréhensible ce que nous savons déjà : par exemple qu’il n’y a pas besoin de construire l’incinérateur. C’est vrai, nous le savions déjà, mais nous avons à présent un peu plus d’informations, clarifiées en chiffres et avec le détail des futurs morts (mais je me souviens pourtant de Seveso depuis que je suis enfant !), nous sommes scientifiquement convaincus d’avoir raison. Et maintenant ? Nous leur laissons tout entre les mains ? Nous croyons un peu plus en la science et la technologie qui peuvent nous sauver ?

Ma pensée va aux habitants d’Erto et de Casso, mais oui, ceux du Vajont(3), ceux qui vivaient si «profondément» la montagne qu’ils savaient déjà qu’elle aurait cédée sous le poids des imposants travaux de la digue (percement, comblement et transfert du lac).
Eux, ignorants des chiffres et des preuves scientifiques, obstinés dans leur refus de croire les techniciens qui rassuraient les gens butés, avaient perçu tous les cercles créés par cette pierre jetée-là, toutes les conséquences extrêmes, parce qu’ils en avaient une connaissance profonde et sincère, parce qu’il y avait un rapport de coopération entre la montagne et toute leur vie. « Peut-être, dira quelqu’un, que s’ils avaient trouvé un expert en la matière qui allait à contre-courant, un qui n’était pas vendu, auraient-ils pu faire entendre leur voix de façon plus forte, plus décisive et plus sûre. »
Certainement, mais ce n’est pas eux qui auraient parlé, ce n’aurait plus été leur lutte, et leur Vajont se serait à nouveau transformé en un amas de nombres.
C’est vrai, un moment fondamental d’une lutte est celui de la recherche et de l’échange d’informations ; mais ne le considérons que comme une étape parmi toutes afin de parvenir à être plus conscients, afin de construire une opposition plus décisive. Que ce soit clair : les chiffres ne sont pas l’unique raison pour s’opposer. En d’autres mots, ils ne sont pas « la vérité », les prétendues réalités scientifiques ne sont pas le terrain d’où pourra germer une lutte passionnée ; de nombreuses autres raisons, et tout aussi légitimes, aura celui qui ne veut pas par exemple que les lieux où il jouait enfant soient détruits.
Si ce lien pur avec le territoire sur lequel nous vivons a probablement été rompu depuis longtemps, nous pouvons trouver des raisons de lutter dans nos souvenirs ou dans le désir de se réapproprier le temps présent, et pas uniquement à partir d’une vision catastrophique du futur, dessinée par quelque scientifique. Si nous sommes en quête d’un profond dialogue avec l’environnement et ses habitants, cet élan sera bien plus durable que n’importe quelle théorie passagère. La lutte ne se base pas sur des nombres et des statistiques, mais sur notre propre volonté de nous réapproprier des cercles toujours plus grands : ce n’est qu’ainsi que nous pourrons vraiment modifier les conséquences d’un acte.

Cet article est paru dans le numéro 2 de El salvanèl, un petit journal qui sort au niveau local dans le Trentin (nord de l’Italie), et qui s’intéresse au thème spécifique de l’environnement. Il s’adresse à toute personne qui voit le territoire qu’elle habite crouler sous le poids des intérêts économiques et celui des différents pouvoirs. Ce second numéro se rapporte à la question du recyclage des déchets. Cet article en particulier a été écrit après qu’on eut assisté à un défilé de chiffres et de politiciens, qui tentaient de récupérer l’opposition publique à un incinérateur
Note de traduction :
1) Une contestation est en cours depuis de nombreux mois contre la construction d’un incinérateur régional à côté de la ville de Trento. L’association locale qui regroupe une partie des habitants a notamment organisé un colloque dans des salons huppés avec des contre-experts, pour ,d’une part, démontrer la nocivité de l’incinérateur et ,d’autre part, proposer une solution alternative.
2) Jeu de mots : impresario signifie en italien à la fois imprésario et entrepreneur.
3) En 1962, le barrage du Vajont, contesté par la population mais construit quand même, provoque un accident jamais vu. En effet, une nuit, un pan de montagne, fragilisé par les travaux de la construction d’un lac artificiel, tombe dedans, provoquant une gigantesque vague qui franchit et va anéantir un village entier situé à 10 kilomètres de là, tuant presque tous ses habitants.[El Salvanèl, CP 45 - 38068 Rovereto – n°2, mars 2005, pp.2-3]
Ecrit par libertad, à 22:49 dans la rubrique "Pour comprendre".

Commentaires :

  ouf789456123
30-01-06
à 19:52

Que c'est bon d'être aveugle...
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