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L'En Dehors


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Les femmes haïtiennes, gardiennes de la tradition libertaire du pays

Lu sur Risal : "Haïti commémore en 2004 le bicentenaire de son indépendance, quand la population de l'ouest de l'île de La Española (que le pays partage avec la République dominicaine) mettait en échec l'invincible armée napoléonienne. Bien avant la célèbre bataille de Waterloo qui, en 1815, scellait le destin de l'empereur français... La liberté du pays a coïncidé avec la conquête de la liberté du peuple constitué en grande partie d'Africains et de leurs descendants issus de l'esclavage destinés aux cultures de la canne à sucre et qui, nourris des idéaux de la Révolution française, ont été les héros de la naissance de la première nation noire et latino-américaine indépendante.

2004 est un autre moment décisif et historique au cours duquel la nation cherche à rompre avec les régimes dictatoriaux et illégitimes qui se sont succédé à la tête du pays au cours de ces deux siècles. Au cours de cette période, les interventions des Etats-Unis (qui ont occupé Haïti pendant 19 ans de 1915 à 1934), ont alterné avec celles de la France, l'ancienne métropole qui veut actuellement reprendre un rôle de tuteur dans le pays.

Cependant, la motivation libertaire de 1804 ne semble avoir survécu en Haïti que dans le secteur de la population qui est toujours exclu des récits historiques : les femmes. Lors de la journée internationale dédiée à la fin de la subordination féminine, les femmes haïtiennes ont mis en garde : « une véritable reconstruction du pays doit se démarquer catégoriquement de toutes les pratiques d'impunité. »

Cette affirmation fut faite par Coordination nationale de plaidoyer pour les droits de la Femme (Conap) qui réunit plus de vingt organisations regroupant des femmes haïtiennes. Aux côtés de la Conap, on trouve l'Association d'études de genre et des femmes de pays en transition (Enfofam) et les organisations féministes Kay Fanm et Solidarité Famn Aytian (Sofa). La Conap dénonce les « relations dangereuses » unissant les opposants locaux et étrangers à Jean Bertrand Aristide, président élu de façon frauduleuse en 2000 et qui a renoncé à son poste il y a une semaine. [Article publié le 8 mars]

« Non contents d'occuper militairement le territoire national et d'avoir écarté la population du processus de démission de l'ancien dictateur, qui a eu lieu dans le chaos total que nous vivons actuellement, les soi-disant « amis de Haïti » imposent la présence de membres influents d'un régime hors la loi pour, prétendent-ils, réunir les forces vives de la nation. Selon la Conap, les politiciens Yvon Neptune et Lesly Voltaire (respectivement Premier ministre et ministre des haïtiens vivant à l'étranger) sont directement responsables des innombrables actes de répression sauvages contre la population et de la corruption, devenue officielle au cours du règne de Fanmi Lavalas (qui a pris le pouvoir de Aristide quand celui-ci a été élu président pour la première fois au début des années 1990). »

La continuité du système patriarcal

Les associations de femmes haïtiennes affirment être les descendantes directes des mains féminines qui ont construit le pays pendant deux siècles et auxquelles l'on rend hommage au cours des fêtes nationales annuelles ; la présence de femmes telles que Chaire Heureuse Dessaline, des militantes de la Ligue féminine d'action sociale (la première organisation féministe du pays), Sanite Belaire, Guillonet Charlot, Cecile Fatima, Pierrette Jolibois, Marie Jeanne ou Suzanne Louverture, y est toujours présentée comme un point important des festivités.

Par exemple, le 18 novembre, on fête la date de la bataille décisive qui a donné la victoire à l'armée de la nation naissante face à l'armée coloniale de Napoléon. A cette occasion, les groupes féministes rendent hommage aux nombreuses femmes combattantes telles que Victoria Mantou, dite "Toya", héroïne de l'indépendance aux côtés de Toussaint L'Ouverture, Jean Jacques Dessalines et Henri Christophe.

Mais comment se fait-il qu'un pays qui a été le théâtre de tant d'élans libertaires ait été également marqué par autant d'expériences autoritaires ? Pour Myriam Merlet, présidente de la Enfofam, « la cause réside dans les pratiques politiques nocives basées sur une conception patriarcale du pouvoir ». Pour elle, qui est aussi économiste, le patriarcat est l'institutionnalisation de la suprématie masculine. Elle explique que « cette conception hiérarchique du pouvoir repose sur l'exclusion comme mécanisme primaire pour contrôler la population. Cela provoque la concentration des richesses et du pouvoir dans les mains de quelques privilégiés, des hommes dans leur grande majorité, et on utilise la répression et la violence pour encadrer les catégories marginalisées telles que les femmes ».

Cette combinaison de croyances, de valeurs et de pouvoir forme la cadre de la discrimination féminine non seulement en Haïti mais dans le monde entier qui est toujours dominé par un modèle patriarcal en dépit du fait qu'il tente de le nier en votant des lois qui restent lettres mortes. « La discrimination signifie la subordination des femmes, cantonnées à remplir des rôles sociaux marginaux, à être dévalorisées pour ce qu'elles sont et pour le travail qu'elles fournissent, à avoir un pouvoir de décision limité et restreint à peu de domaines, à être considérées à peine comme responsables des tâches domestiques » explique Merlet.

L'histoire du mouvement féministe en Haïti

Pour toutes ces raisons, l'histoire du mouvement des femmes haïtiennes est marqué par des efforts pour changer la mentalité patriarcale, par la lutte pour l'obtention progressive de l'égalité au niveau légal et, comme l'affirme le collectif des organisations féminines, « afin de promouvoir une société dans laquelle les individus sont effectivement libres et où ils ne sont plus prisonniers d'une condition définie sur base de leur genre ».

La recherche d'une citoyenneté complète pour la femme en Haïti, qui a commencé avec les héroïnes fondatrices du pays, a été reprise en 1934 avec la fondation de la Ligue féminine d'action sociale qui est parvenue en 1950 à ce que l'Etat haïtien reconnaissent le droit aux femmes de voter et d'être candidates à des charges politiques, droits qui n'ont pu être exercés pour la première fois qu'en 1957.

Après cette première conquête légale, le mouvement féministe est entré en clandestinité avec l'instauration de la tyrannie de la famille Duvalier en 1964. Le 3 avril 1986, après la chute de la dictature des Duvalier, les femmes haïtiennes ont organisé une manifestation historique pour réorganiser le mouvement dans le pays en protestant principalement contre la « féminisation » de la pauvreté et l'articulation entre répression sociale généralisée et une plus grande violence envers les femmes.

Actuellement, les femmes revendiquent une reformulation de la Constitution haïtienne, puisque, comme nous le dit Merlet, « la législation du pays a ignoré les Haïtiennes depuis la formation de l'Etat ». Les réformes légales que les groupes de femmes considèrent comme urgentes sont celles qui concernent la question de l'avortement, de l'adultère (qui, quand il est commis par une femme, implique des peines sévères), les agressions sexuelles, les conditions d'exercice d'un travail domestique rémunéré et d'un traitement particulier que l'Etat devrait mettre en oeuvre en faveur des femmes victimes de violence, principalement celles qui sont chargées de services de police, judiciaires ou médicaux. Pour promouvoir ces changements, les femmes haïtiennes ont formé un comité de négociations composé d'organisations de femmes et de parlementaires.

Néanmoins, pour Merlet, Haïti doit aussi compter ses ressources pour se lancer dans l'immense tâche à venir : reconstruire le pays. « Nous sommes le point de rencontre de différentes civilisations. Cela, comme ailleurs, nous apporte une richesse extraordinaire. Nous, les femmes haïtiennes, nous voulons valoriser notre race métisse et nous devons valoriser notre ascendance noire. Notre culture est fortement marquée par notre héritage africain notamment concernant la culture vaudou, unique en elle-même. Au travers de cet héritage, nous pouvons construire des ponts pour une réalité meilleure ».

 

Source : ADITAL, 08-03-04.

Traduction : Anne Vereecken, pour RISAL.

Ecrit par libertad, à 12:39 dans la rubrique "International".



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