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L'En Dehors


Quotidien anarchiste individualiste





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Zo d'Axa, un écrivain en Marge
Lu sur Increvables anarchistes : "L'anarchisme, " c'est la vie évoluant sans cesse ", dit Sébastien Faure dans l'Encyclopédie anarchiste.Pensant par lui-même, ayant à trouver un modus vivendi qui ne lui soit pas imposé de l'extérieur, l'anarchiste se retrouve bien souvent en dehors de la société : en dehors des habitudes, des traditions, des règles de vie admises et encouragées par la société. C'est un non-conformiste, un individu " en marge ". L'écrivain partage ce sort : les auteurs anarchistes seront qualifiés d'irréguliers, de réfractaires. Le " réfractaire ", c'est d'abord celui qui brise (l'uniformité de la pensée établie, le consensus), celui qui est d'avis contraire ; c'est ensuite celui qui ne se laisse pas briser, qui contredit, qui résiste. Jules Vallès écrivait : " partout où l'on rencontre un tempérament particulier, une nature en dehors et un peu téméraire, on peut être sûr que tôt ou tard le talent jaillira, comme jaillit la sève au flanc déchiré des arbres ".

L'Endehors
L'Endehors, c'est le nom de la revue de Zo d'Axa (de son vrai nom : Alphonse Gallaud de la Pérouse), qui rassemblera, à partir de 1891, Octave Mirbeau, Bernard Lazare, Victor Barrucand, Félix Fénéon, Georges Darien... Tous ceux pour qui La Révolte, le journal anarchiste de Jean Grave (le pape de la rue Mouffetard), semblait trop sérieux, trop orthodoxe". Son ambition en créant le journal était de donner une feuille libre aux écrivains impatients de parler sans retenue, une tribune où chacun pourrait aller jusqu'au bout de sa pensée : un groupement sans idéal, sans hiérarchie, dans lequel l'artiste s'épanouirait. Journal au titre insolite, à la mise en page dite à l'américaine, L'Endehors porte en épigraphe : " Celui que rien n'enrôle et qu'une impulsive nature guide seule, le passionnel complexe, le hors-la-loi, le hors-d'école, l'isolé chercheur d'au-delà ".
On peut s'étonner du dernier terme, de cette allusion à un hypothétique absolu. Zo d'Axa a toujours refusé les idéaux trompeurs : " Pas plus groupés dans l'anarchie qu'embrigadés dans le socialisme, nous allons, individuels, sans la Foi qui sauve et qui aveugle ; nos dégoûts de la Société n'engendrent pas en nous d'immuables convictions, nous nous battons pour la joie des batailles, sans rêve d'avenir meilleur ". Il ne faut donc pas entendre, derrière cet " au-delà ", chanter les lointains lendemains.
Non : chercher l'au-delà, c'est bien plutôt ne pas se contenter de ces vagues promesses de bonheur renvoyé à un futur incertain - mais vivre le présent intensément, vouloir tout et tout de suite. L'au-delà ici et maintenant !
" Vivre pour l'heure présente, hors le mirage des sociétés futures ; vivre et palper cette existence dans le plaisir hautain de la bataille sociale. C'est plus qu'un état d'esprit : c'est une manière d'être - et tout de suite ".

" Un vagabond, vous ai-je dit "
Ecrivain inclassable, Zo d'Axa est l'incarnation littéraire de l'en-dehors,. On ne peut lui assigner un lieu ; il est constamment en voyage, en mouvement. Voici le portrait qu'en fait Victor Méric : " Je l'ai rencontré, souvent, la main posée légèrement sur la selle de sa bicyclette. Il me disait : "C'est une compagne fidèle ; elle me suit comme une ombre ; elle court et glisse à mon côté." Sur ses épaules, il portait une couverture enroulée et, à la première étape, il la jetait à terre, se couchait dessus, dédaigneux des abris qu'offrent les chambres d'hôtels. Un coin quand il pleuvait, le ciel fourmillant d'étoiles quand il faisait beau.
Un vagabond, vous ai-je dit ". Comment le définir ? Journaliste, écrivain, pamphlétaire ?
C'est un " original " : il n'a jamais voulu se réclamer d'aucun mouvement - pas même du mouvement anarchiste. Il dira en 1921 dans Le Journal du Peuple : " On nous traitait d'anarchistes, l'étiquette importait peu. En sommes il n'y a que deux partis, loups et chiens à jamais hostiles. Et pas seulement deux partis : deux instincts, deux façons de sentir. Oui, j'écrivais pour le plaisir - le plaisir de dire ce que je pensais, au fait ce que je ressens toujours ".
Zo d'Axa est d'abord poète, et écrit de courts poèmes, Les Intensifs, jamais publiés. Il crée L'Endehors en 1891. Traqué par la police, il quitte la France en 1896. Lorsqu'il revient, c'est pour publier La Feuille, de 1897 à 1899. Après le dénouement de l'affaire Dreyfus, il repart sur les routes, en trimardeur. Il s'agit de poursuivre la recherche de la vie, sous une autre forme, en Orient, au Canada, parmi les Indiens. Pour finir par tenter la traversée de Paris : Belleville, Grenelle, la Butte... un bâton à la main, ou à bicyclette. On ne lui connaît qu'un seul long texte, De Mazas à Jérusalem, écrit en prison, paru en 1895. C'est le récit de son exil, entrecoupé d'anecdotes ou de réflexions.
Le plaisir de vivre et d'écrire
De Mazas à Jérusalem se présente comme une autobiographie dont l'auteur chemine sans but, toujours incompris, partout étranger.
Il part " pour n'importe où " et se retrouve à Londres, Rotterdam, remonte le Rhin. À Milan, il évoque une manifestation anarchiste. Il ira jusqu'à Jérusalem, avant d'être arrêté et enfermé à Sainte-Pélagie. Parmi les autres malfaiteurs, il est encore la " brebis galeuse " : tous les prisonniers s'inclinent devant la loi, aucun ne revendique son acte (" Et voilà comment le criminel écrivain que je suis fut séparé des "droits communs" "). Ces condamnés honteux qui se cherchent des excuses, qui se veulent honnêtes et parlent de leurs fautes avec d'édifiants repentirs, l'écœurent. Zo d'Axa, c'est la littérature en action. Il la suscite.
On ne peut parler de lui avec nos mots habituels. Il bouscule les catégories, nous force à revoir nos classifications, à éviter les mots faciles, les clichés. À sortir de la littérature. La révolte n'est pas une chose qui se met en formules ou se codifie ; elle se vit. " L'idée de révolte n'est pas une quelconque maxime, une foi nouvelle destinée à tromper encore tes appétits et tes espoirs. C'est l'altière volonté de vivre, c'est l'art de marcher tout seul - en dehors - il suffit d'oser ".

Un homme libre, Zo d'Axa ?
En liberté provisoire, toujours ! Un en dehors ?
Plutôt " en-dedans ", le raillait-on, lors de ses fréquents séjours en prison ! Aristocrate, Zo d'Axa ? À beaucoup, il paraît élitiste et aristocratique, car il pense que la révolution ne dépendra pas de l'action sociale mais du développement d'individus forts. Selon lui, les individus doivent se libérer eux-mêmes et ne rien attendre d'en-haut. On a beaucoup écrit sur ces personnages qu'on ne pouvait pas classer, les Zo d'Axa ou les Félix Fénéon, les traitant parfois d'individualistes hautains... Félix Fénéon avait des allures de dandy : on le soupçonne pourtant encore d'avoir lancé la bombe contre le restaurant Foyot. Tous avaient en commun de cultiver une certaine mystification. Le refus de se prendre au sérieux ? Non, plutôt le refus de prendre au sérieux un dogme, une doctrine, une idée... Être soi, envers et contre tous.
Loin du peuple, Zo d'Axa ?
Le premier numéro de L'Endehors comporte un article de fond consacré à la fusillade de Fourmies. Quand la plupart des écrivains se taisaient. Alors, dilettante, Zo d'Axa ? Il aura payé cher son indépendance d'esprit : dix lignes de sa plume dans un journal lui ont valu un an et demi de prison. Relisons les dernières lignes de son récit : " On a parlé de dilettantisme. Il n'est pas gratuit, celui-là, pas platonique : nous payons... Et nous recommençons ". Dilettante, oui. Si l'on prend le mot dans son sens originel : " celui qui trouve plaisir à quelque chose ". La condition, pour rester en-dehors, est cette vigilance de tous les instants, cette solitude forcée. Car ce que la société ne peut admettre, c'est l'homme libre, dédaigneux des étiquettes et des partis. Celui qui remettra en question les bases de sa constitution, celui qui n'acceptera pas le modèle qu'elle nous propose (nous impose).
L'en-dehors gêne, lui qui garde assez de distance critique pour s'étonner de ce qui est " normal " (il est illégal de manifester dans la rue sans autorisation, et légal de bombarder une ville). L'en-dehors qui refuse d'accepter une logique qui n'est pas la sienne (on a le droit de circuler librement, mais non celui, sans papiers, de choisir son pays).
L'en-dehors qui ne prend pas parti pour un camp ou pour l'autre. Zo d'Axa n'était ni pour Dreyfus ni contre Dreyfus : il réclamait seulement le droit de penser librement. Ce qui n'est pas bien vu : cela est toujours mieux d'être pour ou contre (et tellement plus confortable !). Il faut prendre parti...
Malheur à celui qui dénonce l'hypocrisie des deux côtés, qui hésite à s'enrôler derrière des banderoles aux mots d'ordre bien sonores. Zo d'Axa se refusait à " monter dans les bateaux pavoisés de la religion et de la patrie ", et, bien avant l'époque de nos guerres modernes, ne voulait pas davantage s'embarquer sur le " radeau sans biscuits de la Méduse humanitaire ".
Politiquement incorrect, Zo d'Axa ?

Caroline - Claaaaaash FA Paris


- Toutes les citations sont tirées du numéro de Pensée et action (n° 35-36) consacré à Zo d'Axa (Zo d'Axa, mousquetaire - patricien de l'an-archie), Paris-Bruxelles, 1968.
Les principaux textes de Zo d'Axa, ainsi que des extraits d'articles parus dans L'Endehors et Les Feuilles, ont été réunis par Jean-Pierre Cout : Endehors, Paris, éditions Champs libre, 1974."
Ecrit par libertad, à 23:24 dans la rubrique "Pour comprendre".



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