«Nos maîtres voudraient pour la tranquillité des bourgeois et des gouvernants que notre 1er Mai soit un jour de fête, de réjouissances prolétariennes. La paix sociale triompherait et la bourgeoisie serait tranquille […]. Non, le 1er Mai ne sera pas un jour de fête pour les travailleurs conscients, c’est un jour de chômage et de revendications» titrait une affiche syndicale de 1909… Cent ans plus tard, en 2009, des ouvriers «séquestrent» leur patron, des étudiants font de même avec leur président d’université, des enseignants deviennent des désobéissants, des lycéens bloquent les gares, des gens «sans histoire» aident des «sans-papiers», des anti-nucléaires arrêtent les trains… C’est l’insubordination qui vient…
Non, cent ans plus tard nous ne ferons pas du 1er Mai une fête pour les travailleurs mais bien un jour de revendications, un jour de révolte, un jour de combat … car c’est bien la rage qui nous tord les tripes… Car écœurés nous sommes de ce monde où des patrons s'engraissent de stock options pendant que d’autres meurent de ne pas manger, où l’on pourchasse des êtres humains parce que sans papiers, où l’éducation est de moins en moins synonyme d’émancipation, écœurés de ce matraquage consumériste, écœurés de bouffer des pesticides, écœurés de ce monde où l’on peut travailler des dizaines d’années pour une misère, accepter de perdre les 35 heures par des chantages économiques et tout ça pour finalement se faire jeter du jour au lendemain par des «Monsieurs» à cravates, aux parachutes dorés… Que savent-ils donc de nos vies, de nos souffrances, de nos désirs, ces gens-là… RIEN, nous n’avons pas besoin d’eux, qu’ils s’en aillent … nous en avons assez de nourrir, de goinfrer cette classe dominante, cette classe d’assistés, pleurant sur leurs charges dites «patronales» pour que l’État, «bras armé» du Capital vienne nous dire ensuite : «trou de la sécu» … «déremboursement de médicaments» … «fermeture d’hôpitaux, d’écoles» … «suppression de postes» … «les caisses sont vides» … sauf pour les banques … cela va de soi…
On nous parle de crise, on nous refait le coup de l’Union nationale, de la rigueur, de prendre sur soi, on serait tous dans le même bateau qu’ils disent … peut-être, mais sûrement pas à la même place, eux au gouvernail et sur le pont, nous en fonds de cales ou dans les cachots.
Alors que ce vieux monde s’écroule … et de nos espoirs naîtra un monde nouveau, pas un monde vertical, pas un monde de hiérarchie avec sa cohorte de chefs, de profiteurs, NON, nous ne rentrerons plus dans vos cases d’exploiteurs … là où votre monde de capitalistes ne sème que contrôle, aliénation, négation de l’individu, nous construirons un monde horizontal, basé sur le pacte fédéral et la libre association, sur la solidarité, sur l’autogestion des moyens de production, sur l’émancipation par l’éducation et l’art, tout ce qui fait notre humanité. Les prémices de ce nouveau monde sont déjà là, dans nos désobéissances, dans nos refus, dans nos luttes…
Partout en Grèce, en Espagne, en Italie, en Islande … la révolte éclate… Notre internationale vaut mieux que votre mondialisation, notre jeunesse vaut mieux que vos énarques, nos utopies sont plus réelles que vos États policiers…
Alors pour nous, syndicalistes de la CNT, ce Premier Mai ne sera pas un simple jour de fête, un simple troisième temps fort après le succès des grèves générales du 29 janvier et 19 mars, il sera plus que cela… Nous occuperons la rue, car solidaires de tous les prolétaires, nous porterons le même espoir, le même jour, dans le monde entier, avec la même rés(v)olution que ceux qui nous ont précédés et qui ont fait de cette date autre chose, bien autre chose qu’un simple défilé. Alors ce Premier Mai 2009, nos chants seront plus forts, les poings levés plus nombreux et l’INTERNATIONALE retentira plus vibrante que jamais … car de cette journée nous ferons une étape décisive pour construire un mouvement plus large avec l’espoir que le 4 mai enfin la base déborde les confédérations, que des collectifs de quartier se fédèrent, que la population s’organise, que les usines soient occupées, que la production stoppe, que les flux s’arrêtent et que comme nos camarades antillais l’ont fait, la grève générale illimitée se mette en place… C’est l’insurrection qui vient…
Éditorial du Combat syndicaliste, mai 2009
Journal des syndicats CNT.
à 10:29