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« Critique de la nation, de l'Etat, du droit, de la politique et de la démocratie », par Robert Kurz.
Extraits d’un livre de Robert Kurz, aujourd’hui épuisé, Lire Marx. Les textes les plus importants de Karl Marx pour le XXIe siècle. Choisis et commentés par Robert Kurz, La balustrade, 2002, pp. 161-167.

Le texte de Robert Kurz est consultable ici : " Critique de la nation, de l'Etat, du droit, de la politique et de la démocratie ". 

Je décris là rapidement quelques éléments de cette critique du travail comme critique antipolitique, ce que l'on retrouvera plus amplement notamment dans ce texte ci-dessus du théoricien allemand Robert Kurz, chef de file en ce pays du courant de la critique de la valeur.

 La critique du fétichisme de la valeur est une critique antipolitique, qui ne peut passer ni par l'Etat, ni par des syndicats, des partis politiques ou des pratiques autoritaires. La politique et l'Etat, comme la nation qui n'ont rien d'une entité supra-historique (mais doivent être étudiés de manières historiquement spécifique à un monde social donné), sont des instances immanentes à ce monde de socialisations abstraites constitué par la métamorphose folle de la valeur : ils ne sont que l'autre face (politique, Etat, nation, droit, démocratie) de la médaille de la modernisation et de ses catégories économiques (argent, capital, marchandise...). L'instance publique juridique faisant passer les individus aux XIXe et XXe siècles de sujets des rois à des sujets de droits, permet la " libre " mise à disposition de la capacité de travail des individus sur le marché de la marchandise-travail (auparavant l'individu était déterminé par des rapports de subordination direct de type féodal, religieux ou royal), alors que la socialisation abstraite par le travail met dans le même instant tous les individus dans une dépossession généralisée de leur vie concrète. Mais dans les sociétés modernes seul celui qui dépense du travail abstrait est considéré comme sujet de droits à titre plein. Seul ce travail qui avale visiblement du travail vivant pour le transformer socialement en du travail abstrait invisible incorporé aux marchandises selon les règles de rentabilité, de compétivité et de concurrence, peut accéder à la dignité de ce qu'est le véritable " travail " au sens capitaliste (travail que le mouvement ouvrier n'a cessé d'affirmer la positivité en s'identifiant à lui). Et comme " la valeur c'est le mâle " (Roswitha Scholz), longtemps les femmes exerçant majoritairement un travail domestique qui ne correspond pas à ce que la machine de la valorisation considère comme être du travail créant de la valeur, c'est-à-dire un travail pouvant prendre la forme du travail abstrait tout en étant du travail productif au sens capitaliste (producteur de valeur et de survaleur donc), elles furent longtemps écartées de ce statut de sujet de droits abstraits (droit de voter, etc.). 

De plus, l'instance publique politique cette fois-ci n'est en rien une instance autonome et surplombant l'économie, et qui disposerait de ses propres moyens d'action, elle ne fait que ponctionner sur le procès de valorisation capitaliste (sous forme d'impôts) afin d'assurer des tâches de reproduction élargie du capital, que celui ci ne pourrait pas assumer selon ses règles de fonctionnement. En effet, la reproduction élargie de notre société, ne peut pas seulement existée par le procès de la valeur qui s'auto-valorise (le capital). Ce dernier constitué des processus abstraits de socialisation (dont le travail) qui formalisent et donnent un contenu à une très frande partie des échanges humains, ne peuvent s'occuper par exemple des soins aux enfants donnés par une mère, le travail domestique à la maison ou l'éducation pour tous. Dans la société capitaliste, qui veut une reproduction de la capacité de travail des individus, il faut des institutions sociales tels que l'école, la sécurité sociale, la structuration urbaine (des routes, etc., qui ne peuvent pas être construits à l'échelle concurrentielle des entreprises). L'école par exemple qui dans sa forme spécifiquement moderne est déjà une mise en préparation de la qualification, productivité et rentabilité du futur travailleur qu'est l'élève : Les parents travaillent, les élèves apprennent à travailler demain. L'Etat-Providence de l'après Seconde Guerre mondiale dans une période d'ascencion ambivalente de la valorisation (l'accroissement énorme de la productivité grâce à l'automation annonçait forcément la crise du travail abstrait, donc les " Trente piteuses ", mais aussi l'excroissance du capital fictif boursier), portait ce processus d'élargissement de la reproduction capitaliste, par la mise en place à ce moment là de l'Ecole comme ascenceur social au sein des cages (postes) de travail dans lesquelles on peut se débattre mais pas s'échapper, car la socialisation passe par le travail (qui ne travaille pas, ne mange pas). Toute politique publique dépend ainsi dans sa condition de possibilité, de bons procès de valorisation au sein de la métamorphose folle de la valeur. Quand la croissance s'effondre, les fonctionnaires ne sont plus payés pendant des mois, comme aujourd'hui dans de nombreux pays. Si la croissance économique se réduit (comme depuis les années 70 dans les pays développés, jamais nous avons connu les +5% de croissance d'auparavant), si le taux et la masse de profit se réduisent au niveau du capital global, alors l'instance publique politique n'a plus les sources de financement de ses politiques publiques, l'Etat réduit alors sa voilure (fin de l'Etat-Providence, qui ne pouvait avoir lieu qu'au sein des Trente Glorieuses dans une période faste pour la valorisation) et les impôts aux entreprises afin de tenter de les laisser survivre dans la guerre économique à laquelle elles participent et qui dans le même temps les dépassent. C'est là le fondement objectif des politiques néolibérales qui apparaîtront justement dans les années 70, quand la crise du travail abstrait accélée par l'accroissement de la productivité dans les Trente Glorieuses, se montrera au grand jour. Et si le travail abstrait est en crise, alors partout on assiste à la " fin de la politique ", comme le montrait le Manifeste contre le travail, c'est-à-dire la fin du capitalisme d'Etat hérité du XXe siècle (dont le communisme a été une des formes, puisque forme valeur et la survaleur existaient toujours en son sein). C'est d'ailleurs l'énorme paradoxe des " décroissants ", comment ne peut-il pas être contradictoire d'opposer la politique à l'économie, en disant d'un côté comme le fait Serge Latouche, qu'il faut la mise en place de politiques publiques sous le forme d'un programme autour des " 8R" (restructuration, recyclage...) tout en induisant une baisse de la croissance capitaliste ? On reste là, dans la double illusion de la politique : penser qu'elle puisse s'opposer structurellement à l'économie, et penser que dans ce monde là où la politique se réduit à la forme argent de la politique (il faudra bien payer des fonctionnaires, des programmes de recyclage, etc), une baisse de la croissance (et qui est de toute façon déjà là, du fait non de la volonté politique de quelques uns, mais du fait de la limite interne même au capitalisme) peut permettre une existence à la politique. C'est là l'impuissance de la décroissance politique.

A l’automne dernier,  après pourtant l'essouflement de l'hystérie planétaire autour de Barack Obama le " messie " incarnant une improbable bonne volonté politique dans une société fétichiste, la déconvenue pour beaucoup a encore été totale : le sommet de Copenhague avait fait rêver beaucoup d’écologistes ou la sphère médiatique ainsi que le « bon sens » de l’opinion publique européenne, mais sa décision (ou plutôt sa non décision) a ramené à la réalité ces doux rêves régulationnistes. La réalité du fétichisme de l'abstraction réelle valeur. La douche a été particulièrement froide. La politique ne s'oppose donc pas à l'économique, comme le pensent encore la gauche et l'extrême-gauche, et c'est ce que nous explique Robert Kurz dans le texte qui suit. Jacques Ellul lui aussi, mais d'un autre point de vue que celui de la " wertkritik " (critique de la valeur) qui part elle des formes de socialisations spécifiquement modernes au regard de celles des sociétés précapitalistes (et non d'une analyse de la technique, toujours pensée par Ellul comme forme transhistorique de rapport au monde), dénonçait la politique dans son livre L'illusion politique de manière intéressante. De plus, c'est l'anarchisme contemporain et son rejet de l'Etat, des formes partis et syndicales, qui peut trouver un allié dans ce texte de Robert Kurz. Pour autant, si la grande force de l'anarchisme a toujours été sa dimension anti-autoritaire notamment anti-étatique comme anti-élection, sa compréhension de l'économie est restée très erronée puisque qu'elle n'a cessé d'affirmer une positivité du travail (même sous la forme de l'oeuvre), perçu comme élément suprahistorique des sociétés humaines, en cherchant simplement à le libérer de son exploitation par le capital. Pertinence donc, mais aussi limite d'un anarchisme a refondé sur ce point important.

Dans le texte ci-dessus, par « Marx exotérique » et « Marx ésotérique » (il y a comme un « Marx-Janus »), Kurz entend distinguer deux interprétations différentes de l'oeuvre de Marx, l'une étant celle traditionnellement admise (exotérique), reposant principalement sur un point de vue qui se fait à partir du travail (que l’on interroge pas dans sa spécificité et qui est vu comme naturel et supra-historique) et dont l'objet d'étude est surtout la lutte des classes. Cette interprétation traditionnelle , se focalise sur le mode de distribution. L'autre est bien moins connue (ésotérique), mais elle ne défend pas l’idée qu’il y aurait un « vrai Marx », dont la pensée aurait été trahie et qui devrait être restaurée. Le Marx exotérique correspond en effet à ce que Marx a écrit généralement dans le plus gros volume de ses textes. Il s’agit plutôt de dire que dans certains textes (notamment ceux qui n’étaient pas destinés à être publiés – Grundrisse - ou qui l’ont été bien plus tard après la formation des marxismes), il y a des éléments qui permettent d’ « aller avec Marx au-delà de Marx » et donc de dégager, à partir de cela, autre chose que le Marx connu : un « Marx ésotérique » (caché, comme dit parfois Kurz). Cette interprétation se fait non plus cette fois du point de vue du travail mais plutôt de la possibilité de son abolition. Le Marx ésotérique est alors celui qui critique aussi bien le mode de distribution que le mode de production capitaliste en partant de l'analyse des catégories historiquement déterminées que sont la valeur, la marchandise, l'argent, le travail, le capital. Les différents Etats qui se sont réclamés du Marx exotérique, notamment dans les pays en retard de développement capitaliste au XXe siècle (Russie, Chine, Cuba...) ont réalisé une " deuxième modernisation ", c'est-à-dire l'installation des catégories capitalistes et du mode de production irrationnel de marchandise, dans autre chose qu'un libre-marché. C'est une modernisation de rattrapage, qui n'a en rien été anticapitaliste. Pays de l'Est et pays de l'Ouest n'ont pas été deux systèmes économiques antagonistes. Ces pays qui ont pratiqué au XXe siècle l'installation des catégories économiques protégées par une autarcie d'Etat des règles de concurrence, ont connu les mêmes phénomènes irrationnels des catégories économiques installées. Et la première preuve d'ailleurs que le capitalisme n'a rien de quelque chose de naturel, d'évident et de transhistorique est venue de ces pays de la modernisation de rattrapage : l'Union soviétique s'est effondrée économiquement.  

Diggers

Quelques textes sur la critique du travail comme mouvement antipolitique :

Anselm JAPPE, " La politique n'est pas la solution ", extraits de Les Aventures de la marchandise, Denoël, 2003.
Anselm JAPPE,
" Politique sans politique ", dans la revue Lignes, 2008.
Anselm JAPPE, " La violence, mais pour quoi faire ? ", dans la revue Lignes, mai 2009.
Robert KURZ, Les paradoxes des droits de l'homme. Inclusion et exclusion de la modernité, dans Archipel n°106, 2003.
Groupe Krisis, " La lutte contre le travail est une lutte antipolitique ", chapitre XIII dans le Manifeste contre le Travail, UGE, 10/18. Aujourd'hui épuisé mais téléchargeablement librement.

Quelques explications sur la critique de la valeur comme critique du travail :

Anselm JAPPE, Pourquoi critiquer radicalement le travail ?

Christian Honer, Qu'est-ce que la valeur ? De l'essence du capitalisme. Une introduction.

Ecrit par Diggers, à 22:45 dans la rubrique "Pour comprendre".



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