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HRISTOPHE ET ROSE
Orset pourraient être
des éleveurs heureux.
Leur récente
installation agricole
de 1,2 hectare au pied du Luberon
va plutôt bien : 1500 volailles bio,
incluant 600 pondeuses dont ils
vendent les œufs en circuit court
via les marchés et les Amap.
Alors qu’en France chaque jour
voit cinq exploitations agricoles
mettre la clef sous la porte, ils ne
s’en sortent pas trop mal. Mais
depuis quelque temps, un invisible
voisin leur met une pression
colossale. « Ça a commencé
par une lettre, en 2004, où il se
disait “choqué” par l’installation
de nos serres de maraîchage,
raconte Christophe. C’est l’aspect
visuel qui le dérangeait. Début
2005, une actrice américaine, Julie
Payne, est venue faire l’intermédiaire.
Elle proposait l’aménagement
ou le déplacement des installations aux
frais du voisin, à condition d’un “retour sur
investissement”, genre contrepartie. Puis, elle
a annoncé clairement : “Combien pour partir ?”
Ils proposaient 60 000 euros. Nous, on était
prêts à discuter de vive voix d’aménagements
éventuels, mais pas à ce qu’on nous fasse l’aumône
ou qu’on nous traite comme des gueux.
On s’est cru dans un film quand à la fin elle a
précisé : “Cette conversation n’a jamais eu
lieu”. » En matière de cinéma, le voisin capricieux
en connaît un rayon puisqu’il s’agit du
réalisateur hollywoodien d’origine britannique
Ridley Scott. En août 2007, les Orset se
spécialisent dans le
poulailler bio. Le réalisateur
d’Alien, pris de gallinophobie
– signalons que le
terrain où gambadent
les pondeuses des Orset se situe à plus
de 300 mètres [1], quasiment hors de vue du
cinéaste – lance une rafale de procédures
civiles. Scott – qui réside quinze jours par an
dans le Vaucluse – fait intervenir une batterie
d’huissiers et d’hommes de paille pour
constater et exiger le démontage de ce qu’il
considère comme des verrues dans son paysage :
serres, portail, tranchées, haie d’arbustes, cabanons, bâtiments mobiles… Même la
cabane des enfants en palettes et un cabanon
sur le terrain du voisin sont répertoriés ! Les
Orset voient défiler les gendarmes pour des
motifs dérisoires, comme lorsqu’une de leurs
chèvres est allée brouter dans la vigne d’un
autre voisin irascible, un pharmacien-parisien
à la retraite. Seulement voilà, Christophe
et Rose sont parés, ils ont même obtenu des
permis pour des installations qui n’en nécessitaient
pas. Du coup, Scott est débouté. Mais,
possédé par l’esprit procédurier, il se retourne
contre la mairie d’Oppède pour avoir délivré
les permis… Au risque d’être à nouveau
débouté et de devoir payer des dommages et
intérêts à la commune [2]. Les Orset, relativement
confiants, se demandent pourquoi un tel
acharnement. « On entend partout que la perte
d’agriculteurs est un désastre, mais rien n’est
fait pour réellement monter de nouvelles fermes et bloquer la spéculation.
» Signe du destin, le
Schéma de cohérence
territorial – qui vise à
protéger les équilibres
péri-urbains dans une
optique de « développement durable » – donne
en abréviation… le Scot ! Coquin de sort !
Reste la question de l’esthétique, du bruit et de l’odeur, qui offusquent tant la délicatesse de ces estivants fortunés en quête d’une Provence fidèle aux images du magazine Côté Sud. Le champ des Orset n’est pas bordé de cyprès taillés en colonnes gréco-romaines, ni de buissons boule-de-lavande travaillés au coupe-ongles, comme sur le domaine de Ridley Scott. L’ambiance est plus foutraque chez les Orset. « Hétéroclite », selon une adjointe au maire, pour ne pas dire bordélique. Pour autant, elle dénature moins le paysage que certains délires de parvenus. « Les riches s’installent en Provence pour la carte postale, commente Christophe, c’est joli mais ça ne vit pas et ça ne fait pas vivre le pays. La préoccupation première d’un agriculteur, c’est son activité. L’esthétique, ça vient avec le temps et l’argent. Évidemment, pour eux tout est facile. » Et d’évoquer les conflits qu’essaime l’indécence de ces richards : écoulement d’eaux de piscine sur des terres agraires, passe-droits administratifs sur l’accès à la terre [3], entassement des ordures ménagères, mépris vis-à-vis des locaux (on dit que le cuisinier de Mister Scott se fournit exclusivement auprès de traiteurs parisiens), volonté de faire disparaître les dernières traces d’activité paysanne, non-respect des droits communaux, etc. Exemple parmi d’autres, en février 2009, Patrick Bruel décide de clôturer ses dix hectares de propriété, fraîchement acquis près de l’Isle-sur-la-Sorgue, pour se protéger des importuns. Il condamne par la même occasion un chemin de promenade pratiqué par les riverains. De plus, en payant au prix fort son caprice de star, Bruel a fait tripler le prix du terrain. « À Oppède, c’est Scott qui a quasiment fixé le prix de la terre, rappelle Christophe. Nos anciens étaient peut être plus influençables face à la célébrité et à l’argent, mais moi je n’en ai rien à foutre. Je ne partirai pas de mon terrain à moins de cinq millions d’euros ! Une somme extravagante pour 8000 m2, mais c’est pour me mettre au même niveau que lui. » Au fait, le prochain long-métrage de Ridley Scott est consacré à Robin Hood. Vous savez, le hors-la-loi qui volait les riches…
Article publié dans CQFD N°73, décembre 2009, actuellement en kiosques.
[1] La distance réglementaire entre une habitation et un poulailler est de 26 mètres.
[2] Six procédures sont menées contre la mairie pour un coût de 2 600 euros chacune. Résultat du procès devant le tribunal administratif de Nîmes, au 12 décembre dernier, de nouveau débouté et condamné à verser un total de 4 000 euros à la commune d’Oppède au titre des frais de justice !
[3] En 2006, la Société d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER, voir CQFD n° 64), censée aider les jeunes agriculteurs à accéder à la terre, a même donné son accord en un temps record pour que Ridley Scott achète une terre mitoyenne à celle des Orset, au détriment de ceux-ci alors qu’ils étaient en principe prioritaires. Le terrain étant agricole, Scott l’a fait acheter par un de ses hommes liges qui, après avoir défoncé le sol et balancé de l’ammonitrate, a planté de l’orge pour la forme.
Commentaires :
OgRuR |
Il y a une dizaine d'années à Oppède le vieux justement nous avions eu un aperçu de l'irrascibilité de quelques riches propriétaires alors que nous empruntions un chemin communal... S'ils avaient la possibilité ces gens refouleraient la moindre liberté d'aller et venir sur des terres que la nature n'a donné à personne en particulier... Donnez-le l'autorisation d'abattre le moindre passant ils le feront pour se préserver des "nuisances" (c'est à dire de la liberté). C'est la confirmation de la nature profondément liberticide et criminelle des grands personnages de la société du spectacle, c'est à cette nature et à la conscience de ce qu'ils servent (un régime criminel) qu'ils doivent d'y réussir. A Uzès (Gard) il y a belle lurette que de riches étrangers (anglo saxons, flamands, allemands...) ont délogé la population indigène. Avec beaucoup de mépris, beaucoup d'arrogance et avec les moyens dont ils disposent, sans l'ombre d'un problème et sans le moindre scrupule, ils ont brisé des vies. La mairie est à leur botte depuis fort longtemps. Il n'est pas un commerce, pas une profession libérale (bonjour monsieur l'architecte) qui n'ait fait allégeance avec ces riches familles. Les ... en particulier y règnent en maître. La librairie fonctionne sous le patronnage des habitués (l'insipide stipendiée ... et quelques autres). Une autochtone (le plus aimable des femmes) qui s'essayait à monter un commerce indépendant fut coulée en moins de six mois, par les moyens les plus retors, par une coalition de commerçants qui ont fait allégeance avec la richesse du coin. On emploie un ouvrier polonais toute une année pour surveiller et entretenir une demeure immense et richement meublée que les propriétaires allemands n'occupent que 15 jours dans l'année. Ces sortes d'emplois sont courants... Je ne peux pas permettre de parler de certains faits de corruptions connus de tous (sauf de l'Etat...) sans engager la responsabilité de "L'en dehors".... Les Orset ont été nombreux à Uzès. Aujourd'hui il en est de brisés.... Répondre à ce commentaire
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à 15:00