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Néo-libéralisme : de la main invisible à l’idéologie en crise
Lu sur A voix autre : "Depuis ses origines, le néo-libéralisme nous a vanté son naturel et sa place logique dans le monde, il s’est positionné comme la seule et unique voie envisageable. Durant les trente dernières années, l’idéologie capitaliste s’est cachée derrière la main invisible qui régulait les marchés. Rien de plus naturel et d’inhérent à l’homme que de se comporter en bon libéral. Point d’idéologie derrière tout ça mais juste un état de fait inéluctable. La dégradation économique mondiale a fait ressurgir les mots « capitalisme » et donc « idéologie » et les acteurs financiers ont bien dû admettre que leur système n’avait rien d’inné et qu’il était en crise.

Depuis ses origines, le néo-libéralisme nous a vanté son naturel et sa place logique dans le monde, il s’est positionné comme la seule et unique voie envisageable. Durant les trente dernières années, l’idéologie capitaliste s’est cachée derrière la main invisible qui régulait les marchés. Rien de plus naturel et d’inhérent à l’homme que de se comporter en bon libéral. Point d’idéologie derrière tout ça mais juste un état de fait inéluctable. La dégradation économique mondiale a fait ressurgir les mots « capitalisme » et donc « idéologie » et les acteurs financiers ont bien dû admettre que leur système n’avait rien d’inné et qu’il était en crise.

Aux racines du mal

A l’origine, le capitalisme a tout fait pour se dégager de toute morale (la morale chrétienne entre autre) afin de justifier une attitude égoïste tendant vers l’intérêt privé. C’est ajouté à cela la théorie de la « main invisible » voulant que la recherche du bien privé rejaillisse sur le plus grand nombre. Enfin il y a les mythes de la création et du progrès engendrés par la course au profit. Tout ceci n’est bien sûr qu’une pure création de l’esprit que le capitalisme mais surtout le néo-libéralisme vont s’attacher à nous vendre patiemment comme la nature des choses.

Il aura fallu un certain temps et beaucoup d’acharnement aux suppôts du néo-libéralisme pour parvenir à imposer leur modèle. Un certain temps pour battre en brèche les idées keynésiennes [1] adoptées à la sortie de la Seconde Guerre Mondiale et qui avaient donné les « 30 glorieuses ». Le néo-libéralisme s’est construit autour des trois économistes que sont J. Schumpeter (1883-1950), Fr von Hayek (1899-1992) et M. Friedman (1912-2006).
- Le premier, Schumpeter, va prôner l’innovation qui, selon lui, est le moteur de l’économie. Il n’hésite pas à affirmer que l’innovation est génératrice de crises mais qu’elles sont inhérentes et nécessaires au capitalisme. L’économiste reconnait qu’il y a des conséquences sociales mais il les juge négligeables face à l’impératif supérieur : la survie et le développement du capitalisme.
- Le second, Hayek, est le grand idéologue du néo-libéralisme. Pour lui, l’économie ne peut s’épanouir que dans un contexte de démocratie limitée, d’« Etat minimal » (sous-entendu l’abolition de l’Etat-providence), la destruction des syndicats, l’ouverture des marchés et une privatisation maximale (il ira jusqu’à proposer la privatisation des Banques Centrales, autrement dit la dénationalisation des monnaies et sa mise sur le marché). Le marché a toujours raison et l’auto-régulation est spontanée.
- Le troisième, Milton Friedman, va jusqu’à affirmer que le libre-marché est un système scientifique parfait dans lequel des individus créent, à leur profit, des richesses qui profitent à tous. Le rôle de l’Etat se borne chez Friedman, à garantir de l’ordre. Selon lui, ses théories doivent s’appliquer immédiatement après une prise de pouvoir (via élections ou coup de force) afin qu’il y ait un minimum de résistance car il est conscient des risques de mécontentement qu’engendrent ce type de mesures (fin de l’Etat-providence, privatisation etc).Il préconise également le recours à une propagande bien appuyée censée convaincre les populations que les problèmes découlent du manque de dérégulation et non le contraire.

Comme on le voit, les fondements du néo-libéralisme ne sont pas franchement de grands amis de la démocratie. Les libertés réclamées à corps et à cri, sont surtout valables pour le marché mais le peuple, lui, doit être bien encadré. Les mesures sont tellement contradictoires avec le bien commun et les bouleversements culturels sont si importants que le seul régime politique qui puisse appliquer pleinement ses mesures se doit d’être prêt à faire usage de la force et/ou de la terreur politique. Et c’est bien dans les régimes aussi sanguinaires que ceux de Suarto, en Indonésie, et Pinochet, au Chili, que Friedman et ses disciples vont trouver leurs premières niches en 1975. Le Chili va devenir le laboratoire du néo-libéralisme et même le seul pays où la doctrine sera jamais appliquée « à la lettre » avec les conséquences humaines et économiques désastreuses. Dès les années ’50, les Etats-Unis décident de financer une centaine d’étudiants chiliens pour qu’ils viennent recevoir les bons préceptes de Friedman, dans le but de contrer la vague gauchisante qui s’empare de l’Amérique latine. Ces sont ces étudiants qu’on retrouvera auprès du dictateur Pinochet après son coup d’Etat. Au début des années ’80, ce sera au tour de M. Tatcher en Angleterre, puis R. Reagan de pousser en avant les thèses néo-libérales pour qu’elles s’abattent sur le reste du monde.

Dans le cochon, tout est bon

Si, comme on vient de le voir, l’économie néo-libérale n’a rien d’inné et si en plus elle ne risque pas de jouir naturellement d’une grande popularité auprès des citoyens à qui elle veut s’imposer, il faut se poser la question de sa main-mise sur la pensée économique durant ces trente dernières années. Une grande partie des pays qui ont appliqué, peu ou prou, les doctrines Hayek-Friedman n’ont rien des dictatures chiliennes ou indonésiennes. Pourtant, grâce à une mécanique bien huilée, ces pays ont réussi à imposer à leurs citoyens ce que jamais ils n’auraient accepté sans un travail de sape acharné de la part des acteurs de la dérèglementation financière. Naomi Klein, dans son livre La Stratégie du Choc, explique comment la manipulation ouverte des populations a pu les contraindre à se plier au nouvel ordre néo-libéral. L’idée bien connue selon laquelle un sujet en état de choc est beaucoup plus malléable a été habillement reprise par les néo-libéraux pour distiller leurs théories. Ils ont su, durant les trente dernières années, tirer profit des grandes situations de crise afin d’imposer leurs vues sans que personne ou presque ne trouve à y redire.

Parmi les grands chocs favorables à Friedman et ses disciples, on trouve la « stagflation » (inflation sans croissance) des années 70’ qui leurs permet de balayer les idées keynésiennes jusque-là en vigueur en Occident. La chute du Mur de Berlin en 1989 marque le début de l’hégémonie mondiale du libéralisme (avec entre autre le « Consensus de Washington » dans lequel J. Williamson rédige les 10 commandements du néo-libéralisme à appliquer aux pays en difficulté financière). Il n’y a plus d’opposants tangibles, le système soviétique s’est effondré, c’est donc le triomphe de l’économie capitaliste. C’est la preuve, pour les néo-libéraux, qu’il n’y a pas d’autre alternative. Le 11 septembre 2001 sera une autre opportunité saisie habillement par l’administration Bush pour faire voter le « Patriot Act » et désigner un nouvel ennemi, le terrorisme. Ennemi ô combien pratique car invisible et insaisissable. Le climat d’« insécurité » peut donc à tout moment être ravivé pour justifier l’injustifiable.

D’autres moyens sont utilisés parallèlement par les adorateurs de la Finance. Friedman a bien compris l’importance de la vitesse de réaction en cas de crise. C’est pourquoi il soutient la création des « Think Tanks » afin de disposer de réponses toutes prêtes dès que le besoin s’en fait sentir. En cas de crise ou de questionnement, les néo-libéraux ont toujours eu à disposition une batterie de réponses idéologiques qui ont contribué à évincer leurs opposants souvent moins préparés. De plus, le monde de la haute finance est dans la grande majorité des cas, propriétaire des organes d’information (presse, télévisions, sondages, ...). Là aussi, c’est à l’insu du public que les directeurs d’information ont quotidiennement fait passer l’idéologie néo-libérale au premier plan. Le but est d’arriver à contourner le débat démocratique autant que faire se peut. Grâce à tous ses atouts, Hayek, Friedman et leurs disciples ont réussi à ancrer un sentiment de fatalisme parmi les populations. Supprimant ainsi toute velléité de remise en question ou d’opposition à un système foncièrement injuste et nullement naturel. « Il n’y a pas d’autres alternatives » disait Margareth Tatcher. Par sa soi-disant toute puissance, le néo-libéralisme a également séduit bon nombre de gouvernements de « gauche » durant les années ’80 et le début des années ’90 (France, Italie, Venezuela, etc).

Outre les outils idéologiques, on trouve les armes financières qui ont propagé concrètement les théories de l’Université de Chicago. Les grands organismes bancaires mondiaux que sont le FMI, la Banque Mondiale, l’OCDE-OMC sont directement responsables de cette épidémie. Le FMI, via le levier des prêts et des promesses d’investissements, mais aussi par des pratiques encore moins reluisantes[2] , a contraint les pays en voie de développement à basculer dans une économie de marché au détriment de leurs populations et de leurs économies. Les « ajustements structurels » exigés se font au détriment des politiques sociales, de soins de santé et de développement, ouvre le pays au pillage des ressources et à la surexploitation des populations.

Décédé en 2006, Friedman aura raté la « crise des subprimes » mais ses idées continuent leur cheminement dévastateur. Dernier avatar en date, la guerre en Irak et bientôt son « remplacement » par celle d’Afghanistan. Car outre le fait que ces guerres ont pour but d’accroitre les avoirs des multinationales étasuniennes (pétrole, marchés publics, etc), une nouvelle dimension a vu le jour, celle de la privatisation des conflits. En effet, le recours aux compagnies privées comme Halliburton ou BlackWater est un échelon supplémentaire gravi dans la course effrénée à la libéralisation. Ces compagnies souvent proches du pouvoir, bénéficient de contrat « cost plus » (à payement garantis) auprès du gouvernement (donc avec l’argent du contribuable) alors qu’il n’y a pas d’appel d’offres. Par ailleurs elles permettent au pouvoir de se dégager de « toute » responsabilité morale en cas de dérapages flagrants puisqu’il s’agit de sociétés privées et non pas étatiques.

Le néo-libéralisme a vite compris qu’il devait avancer masqué s’il voulait avoir une chance de s’imposer s’il ne lui était pas possible d’avoir recours à une violence directe. C’est donc drapé de naturel, d’excellence et d’innovation qu’il s’est présenté au monde comme la fin de l’évolution, la fin de l’Histoire. Par ce biais, il réussit à imposer aux populations mondiales un modèle destructeur qui sera toujours bien à l’opposé de la voie qu’il empruntera pour lui-même. De crises économiques en crises sociales, ce système présente un bien sinistre bilan : prise en otage de la démocratie, destruction du travail, mise au pas des syndicats, surexploitation des salariés, dépeçage de la santé et de l’enseignement, guerres économiques et mise en danger de la planète par son exploitation massive. Tout ça pour quoi ? Pour qu’une poignée de rapaces se goinfre tant et plus au détriment du reste de la population. Il est grand temps se repenser la société, d’en finir avec la concurrence débridée et son lot de misères, d’arrêter de croire que les voies sont toutes tracées.

[1] J. M. Keynes (1883-1946) : Le keynésianisme vise avant tout le plein emploi dont dépend, selon lui, les investissements étatiques dans le secteur public. L’Etat doit également jouer un rôle dans la régulation des marchés pour éviter leurs excès et donc mieux fonctionner. Ces théories économiques inspirent la politique du New Deal au président Roosevlet.

[2] J. Perkins, dans ses « Confessions d’un assassin financier » relate comment il a influencé, en usant de tous les moyens nécessaires, la politique économique de pays d’Asie et d’Afrique.

Bibliographie :

Ignacio Ramonet, Le Krach parfait, Crise du siècle et refondation de l’avenir, Galilée, 2009

Naomi Klein, La Stratégie du Choc ; la Montée D’un Capitalisme du Désastre, Actes Sud, 2008

Frédéric Lordon, Et la vertu sauvera le monde ... Après la débacle financière, la salut par l’ « éthique » ?, Raisons d’Agir, 2eme éd., 2008

Frédéric Lordon, Jusqu’à quand ? Pour en finir avec les crises financières, Raisons d’Agir, 2008

Ecrit par libertad, à 22:19 dans la rubrique "Economie".



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