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L'En Dehors


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La Journaliste et Colonna
Le procès Colonna ne s'avérera pas, comme on l'a prétendu, une nouvelle affaire Outreau.
La cour d'assises spéciale, qui juge Colonna, n'a pas grand chose à voir avec la justice ordinaire.

Elle se nommait autrefois cour de sûreté de l'état.
Elle était composée de trois magistrats civils et deux militaires.
Sans jury, bien sûr.
Puisqu'elle remplaçait les tribunaux militaires.
Qui s'occupaient des civils lorsqu'était déclaré l'état d'urgence.
A la manière dont les militaires s'occupent des civils en pareil cas
(sans excessif formalisme légal).
Toutefois ces tribunaux rentraient dans les casernes lorsqu'on levait l'état d'urgence.

Et c'était un bien triste spectacle, se disait le Général.
Le général de Gaulle, après la guerre d'Algérie.
Il avait donc institué, en 1963, la cour de sûreté de l'état, qui offrait elle aussi, mais en temps de paix, les meilleures garanties que l'accusé n'en aurait aucune.
En 1983, François Mitterrand fit supprimer cette juridiction d'exception.
En 1986, Charles Pasqua, qui s'occupa de tribunaux avant que les tribunaux ne s'occupent de lui, la fit rétablir.
Sous le nom de cour d'assises spéciale.
On en avait supprimé les deux juges militaires, qui faisaient tâche.
Ils furent remplacés par deux civils à l'âme bien trempée.
Mais à ce détail près, c'était toujours la même.

Or, vous savez ce qu'on dit.
La justice militaire est à la justice ce que la musique militaire est à la musique.
(Faite pour qu'on marche au pas.)
Ses couacs et ses fautes de goût ne sauraient rejaillir sur la musique et la justice civiles.
L'affaire Colonna ne sera pas une nouvelle affaire Outreau.
Elle ne remettra pas en cause le fonctionnement de la justice ordinaire.
On ne saurait en dire autant du fonctionnement des journalistes ordinaires.

A quelques exceptions près (dont le remarquable chroniqueur judiciaire du Figaro, ou celui de 20 Minutes), leurs articles ont souvent reproduit sans grand discernement, et avec une bonne volonté suspecte, les thèses de l'accusation et de la partie civile.
Vendredi dernier, Libération décrochait le pompon.
C'était le jour où le commissaire Vinolas, ex-secrétaire général de la région Corse, ex-adjoint du préfet Erignac, disait sa peur qu'on ne condamne un innocent, et révélait l'existence d'autres suspects que Colonna dans cette affaire.
La chroniqueuse de Libération n'en parla pas du tout.
Pas un mot.
Elle fit son papier du jour sur le témoin précédent, l'expert en balistique.
Lequel était fourni par la défense.
Puisque l'expert officiel, Guy Hémon refuse de déposer en justice.
Il n'avait pas voulu venir au premier procès.
Il ne veut toujours pas au deuxième.
Il a en effet trouvé que l'assassin avait à peu près la même taille que la victime (1m 83).
Alors que Colonna mesure 1m71.
Il n'a pas trouvé, en revanche, que c'étaient des choses à dire dans un tribunal.
Aurèle Mannarini est donc venue à la place de ce monsieur, exposer qu'à son avis le tueur mesurait 1m 85 au moins.
Ce que la partie civile a aussitôt contesté, en argumentant qu'Aurèle Mannarini était une variété de Guignol, qui faisait rire tout le monde.
Qui fit rire en tous cas la journaliste de Libération, puisqu'elle concluait son papier par cette excellente boutade : " A se demander si la défense ne s’est pas tiré une balle dans le pied."
(lol)
Car le fait qu'une deuxième expertise vienne confirmer ce que l'on savait de la première (à savoir qu'elle écartait Colonna de la liste des suspects) lui paraissait sans importance.
Comme lui avait paru sans importance le témoignage du commissaire Vinolas.
Qui pourtant fit un tollé.
Les journalistes, jusqu'ici endormis, s'étaient engouffrés dans la brèche.

Le lendemain Libération en était réduit, faute de mieux, à reprendre la dépêche de l'AFP sur cette affaire.
Et ce mardi, le journal avait changé de chroniqueur judiciaire.
Ainsi que de politique éditoriale.
Alors que durant tout le premier procès, et durant la première semaine de celui-ci, le parti-pris de Libé avait été celui de l'accusation
ce journal émet maintenant des soupçons d'inéquité et d'interventions de l'Etat dans le procès en appel.
Où réapparait le nom du secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant.
Car le très sarkozyste Yves Bot, procureur en charge de l'affaire Colonna en 2002,
accusé par le commissaire Vinolas d'avoir, avec quelques autres, enterré une information favorable à Colonna,
s'est justifié en précisant qu'il avait à l'époque suivi les conseils de Claude Guéant, chef de cabinet du ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy.

Or ce même Claude Guéant avait en 2007, lors du premier procès, provoqué un petit scandale rapidement étouffé.
On avait su qu'il avait convoqué à l'Elysée un témoin cité à comparaître, Roger Marion, ancien patron de la Division Nationale Anti-Terroriste et impliqué jusqu'au cou dans l'affaire Erignac.
Cette convocation ressemblait énormément à une tentative de subornation de témoin.
Il s'en était expliqué en affirmant n'avoir pas du tout évoqué cette affaire durant sa conversation avec Marion.
Le tribunal avait trouvé cette explication largement suffisante.

Mais en 2007 déjà, un haut fonctionnaire avait émis des doutes sur la culpabilité d'Yvan Colonna.
Il s'agissait du préfet Bonnet, successeur en Corse de Claude Erignac, et qui avait recueilli l'information permettant l'arrestation des auteurs de l'assassinat.
C'est à lui personnellement que l'indic s'était adressé.
Bonnet, appelé à témoigner, avait déclaré à la presse : "J'ai des doutes effectivement sur Yvan Colonna et ces doutes, je les exprimerai. Je répondrai avec beaucoup de prudence. En aucune façon, je ne serai péremptoire"
Roger Marion apporta son témoignage le même jour que Bernard Bonnet.
Ses déclarations fracassantes sur la culpabilité certaine de Colonna firent la une des journaux, écrasant les doutes émis avec beaucoup de prudence par le préfet Bonnet.

Peut-être est-ce pour cela que la chroniqueuse de Libération n'avait accordé aucune importance aux révélations de Vinolas.
Elles ne faisaient, somme toute, qu'appuyer les déclarations de Bonnet en 2007.
Qui n'avaient pas à l'époque été prises au sérieux.
Il n'y avait aucune raison pour que ce soit le cas en 2009.
Alors que le cocasse (et la psychanalyse) sont plus que jamais de règle ce procès.

L'humour y constitue la raison dernière de la partie civile.
On a beaucoup dit que Colonna avait, une première fois, été condamné sans preuve et sans aveu.
Il a surtout été condamné contre l'avis des experts et des témoins oculaires, à chaque fois traités en clowns.
Le médecin légiste et les experts en balistiques?
De tristes rigolos.
Le seul témoin du drame, et qui n'a pas reconnu Colonna?
Une victime de la berlue.
Le préfet Bernard Bonnet?
Un psychopathe avéré.

Pour Vinolas non plus, ça n'a pas raté.
Le président a aussitôt convoqué quatre témoins impromptus qui, dans l'ensemble, ont infirmé ses dire, et supposé son dérangement mental, tandis que la partie civile résumait son cas par une citation d'Audiart : "Comment réussir dans la vie quand on est con et pleurnichard".
L'humour, toujours l'humour.
Et l'insulte, toujours l'insulte.
Oui mais voilà, trop tard.

Car, contrairement au prévisible Bonnet, on n'avait pas envisagé le cas Vinolas.
Puisqu'il s'agissait d'un témoin produit par la partie civile elle-même.
Il était peut-être prévu qu'il pleurniche et joue au con, mais certainement pas en faveur de Colonna.
Le tribunal et la partie civile en sont restés comme deux rond de flan.
Lui et son cas de conscience, de ne pas laisser condamner un innocent!
Souffle coupé.
L'humour ne leur est revenu que deux jours plus tard.
Laissant toute désemparée la malheureuse chroniqueuse de Libération.
On comprend qu'elle ait préféré, dans ces conditions, évoquer seulement Aurèle Mannarini, qui avait fait l'objet d'un sketch très réussi.
On est une pro ou on ne l'est pas.
Elle attendait peut-être que la cour d'assise spéciale ait traité en échappé d'asile le commissaire scandaleux, afin d'offrir à ses lecteurs un produit fini réellement amusant.
Mais cet excès de conscience professionnelle lui aura fait raté les deux journées les plus médiatiquement animées de ce procès.
Son employeur lui en a sans doute voulu.
On espère pour elle que ça se tassera, maintenant que tout semble rentrer dans l'ordre.

J'ai parié avec des amis que je connaîtrai un jour avant qu'il ne soit prononcé le verdict de ce procès.
Voici ma recette.
Elle vaut ce qu'elle vaut.
Si, la veille du procès, Le Monde et Libération émettent quelques réserves sur la culpabilité éventuelle de Colonna, ce sera le signe de son acquittement.
Sinon, je crains que ce ne soit à nouveau perpette.

Cette semaine, on a pu lire des articles pleins de doute dans ces journaux de référence.
Mais il ne faut pas croire que c'est gagné d'avance.
Il s'agissait d'une semaine particulièrement pénible pour l'accusation.
Puisque la condamnation en première instance de Colonna avait été principalement fondée sur la certitude policière de sa culpabilité.
Or, en témoignant du contraire, le commissaire Vinolas aura démontré que cette certitude n'existait pas.
Qu'elle relève de la désinformation.
(Dans un milieu, les services secrets, qui en est justement spécialiste.)
Une vraie tuile.
Dont on aurait tort de croire qu'elle se répétera dans les semaines à venir.
Dans quelques jours, peut-être, elle sera oubliée.
La vie judiciaire spéciale reprendra son cours normal.
Et le Monde et Libération, peut-être, leurs commentaires habituels.

En revanche, si le malaise persiste tous les espoirs sont permis.
L'opinion sera préparée à un renversement de situation.
Et si on la laisse s'y préparer, c'est que ce renversement aura lieu.
Tel est le mal que je souhaite à Colonna.

Non que je dispose de lumières particulières sur son innocence ou sa culpabilité.
Mais, à l'heure où l'on ferme Guantanamo, il est tout de même bizarre qu'on juge des gens dans une cour d'assises spéciale.
Il y a, pour les crimes de sang, des cours d'assises normales prévues à cet effet.
Et il est franchement bizarre que l'on s'autorise à condamner des gens dans cette cour spéciale.
Puisque les garanties normales offertes aux justiciables n'y sont pas assurées.
Ecrit par okounine, à 13:42 dans la rubrique "Actualité".



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