Lu sur
Michel Onfray philosophe écrivain : "Par tradition, on n’aime pas le corps dans l’histoire de la philosophie.
Cette méfiance immémoriale semble, de surcroît, privilégier deux appendices qui disent la parenté de l’homme et de l’animal : le nez et le phallus. Afin de conjurer cette animalité, l’Occident a inventé des corps purs et séraphiques mis en forme par des machines à faire des anges : de la castration au mariage bourgeois en passant par toutes les techniques de l’idéal ascétique. Or, pour Michel Onfray, cet état de fait ne saurait durer.
Les philosophes doivent souvent leurs intuitions essentielles à des crises qui mettent en jeu la machine corporelle, puissamment ébranlée avant qu’elle ne recouvre l’équilibre en produisant du système. Ce livre se propose d’extorquer aux penseurs quelques aveux drolatiques ou décisifs afin que l’histoire de la philosophie cesse enfin de n’être qu’une histoire de l’esprit. Dans le même temps, il s’agira ici, par-delà la lignée morale qui va de Platon à nos modernes contempteurs du corps, de réhabiliter une pensée hédoniste dont l’époque a plus que jamais besoin : des cyrénaïques aux enragés de Mai 68 en passant par les gnostiques licencieux, les Frères du Libre-Esprit, les libertins érudits et quelques autres dont La Mettrie, qui écrivit aussi en son temps un Art de jouir, Sade ou Fourier. Ce livre esquisse donc une sagesse où le plaisir aura sa part, autant que la désillusion et le sens de la mort. Il voudrait définir à sa façon, loin des dogmes et des bréviaires, une morale enjouée et tragique – celle-là même dont notre avenir a le plus grand besoin.
éd. Grasset,1991,316 p.
Editions : le Livre de Poche, 1996