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collectif Anarkhia :
"Travailler plus pour gagner plus. Le pays de ceux qui se lèvent tôt. Autant de slogans qui sont à la mode ces derniers mois. L’ouvrage publié par les éditions Gatuzain est assurément aux antipodes de ce genre de visions du monde. Mieux, il met en cause la valeur la plus ancrée dans nos sociétés, jusqu’à en devenir évidente: le travail. Le titre du livre Mari Otxandi illustre cette force en qualifiant de nouveaux hérétiques ceux et celles qui ne se conforment pas au dogme établi.
L’auteure, qui réside à Donostia et qui avait déjà écrit une chronique de retour de missions civiles en Palestine (Gatuzain, 2004), invite tout à d’abord à (re)découvrir Le droit à la paresse de Paul Lafargue publié en 1880, quand "le travail n’est plus (re)mis en question".
Ethnologue et sociologue de formation, elle démonte une à une les évidences. Travailler c’est participer à un effort collectif? Elle rétorque que les richesses sont essentiellement accaparées par les actionnaires et les employeurs. Il faut gagner sa vie ? Avoir un bon travail c’est réussir sa vie ? Elle rappelle l’existence et l’accroissement du nombre de travailleurs pauvres.
La jeune auteure de 30 ans interroge en outre la surconsconsommation et la nécessité qu’il y aurait de changer de voitures tous les deux ans, ou de faire la queue pour l’ouverture des magasins le premier jour des soldes. Quant au travail comme synonyme d’épanouissement personnel, elle veut bien le concéder pour quelques personnes "c’est peut-être vrai pour les artistes", mais estime que ce n’est pas le cas dans la majorité des situations.
Mari Otxandi, dans le sillage des films de Pierre Carles comme Danger travail, ou Volem rien foutre al païs, s’intéresse aux réfractaires du travail salarié en insistant bien sur le fait que "le salariat n’est pas la seule forme de travail possible", à ces "chômeurs heureux dont on ne parle jamais".
Constellation autonome
Ces "nouveaux hérétiques", donc, ne sont pas les parasites ou fainéants que certains veulent voir. Ce sont "ceux qui on fait le choix de vivre en dehors du salariat, mais développent des activités collectives". Ils ont "un autre rapport à la consommation, développent l’autoproduction, bref construisent une autonomie". Elle reconstruit une généalogie de la critique du travail qui passe par le mouvement situationniste dans les années 60, les expériences autogestionnaires des années 70, jusqu’aux expériences de vies non salariées actuelles.
Elle dessine en creux une constellation qui va de ceux qui reconstruisent et refont vivre un village abandonné à ceux qui ouvrent des squats en proposant des activités aux habitants du quartier, jusqu’aux expériences zapatistes ou celles menées à Oaxaca au Mexique.
Elle constate que dans ce dernier cas "on envoie l’armée", de la même façon qu’en Lozère ce sont les bulldozers qui sont intervenus le 11 juillet dernier. Preuve supplémentaire d’une "criminalisation" de ces hérétiques.
Ce livre est une contribution au débat qui se développe ces dernières années sur la déconnexion entre travail et revenu, autour de la réduction du temps de travail ou sur "la fin du travail", à travers un rappel des théories critiques du travail et une description des expériences concrètes d’opposition. Un livre que l’on peut lire, en faisant la sieste, bien sûr.
http://www.gatuzain.com/liburuak_fr/les_heretiques.html
