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L'En Dehors


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D'origine incontrôlable
TOUS FRANÇAIS, nous dit-on, mais à des titres divers. Il y a les vrais Blancs et, parmi eux, ceux dont les parents ou les grands-parents n'avaient que mépris à exprimer envers les Ritals et les Polacks. Depuis les années 1950, nous côtoyons de plus en plus souvent ces citoyens à la peau basanée qui ont largement participé au renouveau économique, au cours des Trente Glorieuses. Il n'en reste pas moins que les enfants et les petits-enfants de ces travailleurs du bâtiment ou de l'industrie automobile sont marginalisés, désignés tels des parasites et traités de sales Arabes quand ce n'est pas de Bougnoules ou autres amabilités. Normal, ils ont des origines...


D'autres ont également les plus grandes difficultés à passer inaperçus. Ils ont la peau trop noire pour songer à se dissimuler. Les plus jeunes d'entre eux, considérés comme des Bamboulas, sont encore plus marginalisés, suspectés d'être globalement des « émeutiers » de banlieue. Très visibles, ces jeunes, issus d'une immigration africaine ne peuvent être que de la racaille, et il en va .de même de ceux qui sont formellement français, comme les Antillais ou les Réunionnais.
Les grands républicains qui nous gouvernent expliquent que nous sommes tous français, mais ils n'oublient jamais de rappeler que certains de nos jeunes compatriotes sont de deuxième ou de troisième génération. Comme s'ils avaient des degrés obligés pour justifier d'une authentique nationalité, française. La bienveillance ignoble qui accompagne ces précisions tient bien plus dû comportement colonialiste d'arrière-garde que de cette soi-disant convivialité exprimée envers ceux qui ont choisi la France, terre supposée de liberté.
Manque de chance, il y a, fort heureusement, ces minorités invisibles qui s'obstinent à perturber le système. Faisant partie de ces joyeux trouble-fête, je ne manque jamais de me réjouir en consultant la rubrique des naissances et décès du bulletin municipal de ma commune. Comme dans bien d'autres localités, on s'aperçoit qu'il naît une forte proportion d'enfants dont les parents sont venus d'ailleurs; dans le même temps, il convient de faire le triste constat que les décès frappent majoritairement des personnes portant des nom du terroir. Il faut s'y faire, la France commence à rouler au mélange!
Faisant partie de ces bons Blancs, pourtant lourdement d'origine étrangère, je ne suis pas particulièrement fier de mon appartenance, mais il faut bien posséder une carte d'identité pour vivre sans trop de tracas dans ce pays. Parfois, il est bon de rappeler quelques vérités aux censeurs. Ainsi, il y a quelques années, cité pour la défense d'un ami orléanais, poursuivi pour diffamation envers la police pour avoir dit publiquement que le centre de rétention du commissariat d'Orléans commençait à ressembler à un camp de concentration, je m'étais payé la tête de la Justice. Appelé à la barre, le président eut le tort de me demander à quel titre j'étais présent. Grave erreur. Je n'oublierai jamais le visage déconfit du magistrat à qui j'expliquais: « Lorsque mon père est arrivé en France, en janvier 1923, il était sans papiers et travaillait clandestinement dans la maroquinerie. La France démocratique lui a toujours refusé la nationalité française, il a pourtant donné à ce pays une institutrice et un journaliste! »
Passée la Seconde Guerre mondiale, je n'ai jamais eu l'occasion d'être fier de ma nationalité française acquise par le fameux droit du sol. Dès l'âge de 16 ans, je faisais partie des militants anticolonialistes, et j'aurai l'occasion de recevoir des coups de trique de notre police républicaine, lors de manifestations pour l'indépendance du Vietnam puis de l'Algérie. On me considérait alors comme un mauvais Français, mais nul n'aurait osé me traiter de « sale juif » car le souvenir des répressions récentes était encore trop vivace.
Fils d'immigrés, réprimés pour leur origine, ma culture d'adoption ne pouvait qu'être révolutionnaire. J'étais français avec le Suisse Marat de 1793, comme avec l'ouvrier hongrois Léo Frankel, qui fut l'un des dirigeants de la Commune de Paris de 1871, avec -les combattants étrangers de la MOI, aux heures sombres de l'occupation allemande et du pouvoir de Vichy. J'étais naturellement français avec les réfugiés républicains espagnols, puis avec les militants algériens assassinés par la police française, le 17 octobre 1961. Je suis de ce pays avec ces enfants à la peau colorée, nés en France mais expulsés avec leurs parents à qui les indispensables papiers d'identité ont été refusés.
Faut-il écrire, pour en convaincre mes contemporains? Je suis un mauvais Français car j'ai le front de rester prioritairement internationaliste!

Maurice Rajsfus

Le Monde libertaire #1435 du 20 au 26 avril 2006
Ecrit par libertad, à 21:50 dans la rubrique "Pour comprendre".



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