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Sexualité : La fonction crée l’orgasme

Lu sur Nouveau millénaire, Défis libertaires : "Obsession récente, l’orgasme a une histoire. Qui ne donne pas envie de jouir à chaque épisode.Le premier orgasme ne date pas d’hier, et Alexandre Vialatte aurait sûrement dit qu’il remonte à la plus haute Antiquité. Peut-être. Encore que les Saintes Ecritures ne nous apprennent rien de cette extase inaugurale. Et il faudra attendre que se lève l’aube du XVIIe siècle pour que le mot «orgasme» fasse son apparition dans la langue française. Tiré du grec «orgân», qui signifie «bouillonner d’ardeur», il a d’abord désigné des accès de colère avant d’être annexé par la science médicale qui s’en servira pour décrire des phénomènes d’irritation ou d’hystérie. Dans son acception sexuelle, le mot «orgasme» est un rejeton tardif dont la carrière se jouera au XXe siècle.

L’homme n’a jamais manqué de vocabulaire pour évoquer l’instant où il «lâche la purée» ou «dégorge le poireau». La jouissance féminine, en revanche, occupe dans l’imaginaire une place plus insaisissable. Il existe bien sûr une forte tentation de la calquer sur le modèle viril. Mais peut-on prendre au sérieux le divin marquis de Sade chez qui les femmes «déchargent» comme n’importe quel camionneur? Ou notre père à tous, Sigmund Freud, lorsqu’il se représente le clitoris à la manière d’un pénis rabougri? La jouissance masculine ne fait pas de mystère. Elle se donne pour une évidence, une preuve par l’acte d’expulsion séminale. Ça se voit et, dans les films porno, ça se montre: il est ici de tradition que l’homme, à l’approche du dénouement, se retire à toute allure de sa compagne afin d’exhiber au grand jour et en gros plan la preuve laiteuse de sa volupté. L’orgasme des femmes ne se déchiffre pas si aisément. Qui en connaît la grammaire et le lexique? Que signifient ces soupirs, ces cris ou ces râles? Est-on seulement sûr de leur authenticité?

En leur temps, les surréalistes s’étaient demandé: «Quels sont les moyens objectifs par lesquels apprécier la jouissance d’un partenaire ?» Comme ils étaient entre mecs, c’est évidemment de leur partenaire féminin qu’il s’agissait. Question d’orgueil, on s’en doute, chez ces mâles soucieux de ne pas se faire avoir. Mais question grave aussi: on sent poindre là-derrière l’idée inquiétante que cette jouissance féminine puisse être à jamais inconnaissable pour l’homme et par l’homme. Comment conjurer l’angoisse? Les surréalistes indiquaient la voie: il faut constituer l’orgasme en objet de savoir. Or, à cette époque encore ignorante de la sexologie moderne, la psychanalyse naissante était bien placée pour cela.

L’orgasme subversif
Freud a peu utilisé le concept de jouissance, et n’a rien fait pour la promotion psychanalytique de l’orgasme. C’est un de ses disciples qui s’en chargera. Né en 1897, en Galicie, Wilhelm Reich appartient à la deuxième génération freudienne. Dès 1927, il publie «La fonction de l’orgasme» où sa grande idée se dessine: l’ordre capitaliste, soutient-il, réclame le sacrifice de cette énergie propre à l’instinct sexuel que constitue la libido. Autrement dit, la société bourgeoise aliénerait l’homme en domestiquant le sexe. L’année suivante, Reich adhère au Parti communiste autrichien. Il devient l’inventeur d’une synthèse improbable: le freudo-marxisme. Bientôt, on le verra créer une Société socialiste d’information et de recherches sexuelles. Puis une Association pour une politique sexuelle prolétarienne (SEXPOL). Voilà l’orgasme enrôlé sous la bannière de la subversion. Il relèverait non seulement du plaisir mais aussi de la mission historique. Et la lutte des classes se glisserait ainsi jusqu’au fond des alcôves, dans le secret des draps. Courage camarades, encore quelques coups de reins et le capitalisme ne sera plus qu’un mauvais souvenir!

Une dizaine d’années après sa mort, en 1957, Wilhelm Reich va devenir l’idole d’une génération révoltée qui rêve de «jouir sans entrave». Comme le note Pascal Bruckner dans «L’euphorie perpétuelle», la grande utopie des années 60 aura reposé sur une véritable «mystique des points culminants». De ce point de vue, la révolution et l’orgasme c’est à peu près la même chose: le refus de la grisaille ordinaire et des compromissions qu’elle exige, le fantasme d’une existence vouée à l’intense, vécue comme une jouissance sans fin, une libération de toutes les chaînes entravant l’émergence d’un homme nouveau.
Idéal de performance

«La formule de l’orgasme est la formule même du vivant», disait Wilhelm Reich. Au fil des ans, l’Autrichien réfugié aux Etats-Unis a de plus en plus évolué vers une théorie physico-biologique de l’univers fondée sur la présence d’une énergie orgastique qu’il s’agirait de mettre à profit. Retiré dans son chalet du Maine, immergé dans un semi-délire paranoïaque, il va alors concevoir de drôles de machines chargées de capter et de stocker cette «orgone atmosphérique». L’héritage du psychanalyste rebelle se retrouve donc, à gauche, dans les idéologies de la libération sexuelle. Mais on le repère aussi, au-delà de toute appartenance politique, dans cette nébuleuse dite du new age où va s’épanouir le désir de se mettre au diapason de l’énergie cosmique.

L’orgasme devait accomplir le salut du corps social; il se contentera, plus modestement, de faire le salut du corps individuel. La révolution ayant fait long feu, on le voit passer ainsi du côté du bien-être et de la science médicale. Il s’agit d’y penser, d’en surveiller la régularité, d’en mesurer l’intensité, d’en prendre soin comme de ses artères ou de son tour de taille. On lui attribue un rôle de remède spirituel. On se tourne vers les arts tibétains de l’amour réputés pour en savoir long sur la question. On suit les conseils abondamment dispensés par les magazines. Et, si cela ne suffit pas, on prend rendez-vous avec un professionnel de la jouissance. C’est que l’anorgasmie (absence d’orgasme) est désormais tenue pour une maladie dont il préférable de guérir. Vous n’avez pas le choix : jouir est un idéal de performance, un devoir, une obligation. La corvée d’orgasme, on en est là aujourd’hui.

Etrange retournement de situation. Sommes-nous entrés dans une ère de dépression amoureuse qui découragerait la jouissance tout en l’encourageant? Comment échapper à cette contrainte pesant sur le plaisir? Faudra-t-il que les voies de l’extase empruntent désormais des stratégies paradoxales? On pense à ce couple, dont parlait Woody Allen, qui connut son premier orgasme simultané à l’instant précis où le juge leur remit l’acte de divorce.

Hollywood, usine à clichés machistes
Shere Hite a une dent acérée contre Hollywood en particulier et les producteurs de vidéos porno en général. «Une grande distance subsiste entre la manière dont les femmes expriment ce qu’elles ressentent sexuellement, et la manière dont elles jouissent, et la représentation visuelle de leur sexualité et de leurs orgasmes. Les vidéos X et la pornographie sur Internet continuent à montrer des femmes qui incarnent les femmes telles que les hommes les fantasment. Elles essaient d’avoir des orgasmes avec les mêmes stimulations que les hommes (la pénétration), s’exhibent dans les attitudes stéréotypées qui plaisent aux hommes, portent des tenues aguicheuses de poules et, bien sûr, sont éternellement jeunes. Le message continue d’être que la pénétration est la seule “vraie” manière de faire l’amour, et qu’une femme “normale” doit avoir un orgasme pendant la pénétration, comme un homme.»

La pornographie étant faite par des hommes pour des hommes, il y a peu de chances pour que la vraie sexualité de la femme apparaisse. Ce n’est pas sans conséquences: on sait que les vidéos X constituent une bonne part de l’éducation sexuelle des adolescents. Autant dire que les clichés ne sont pas près de disparaître…

Michel Audétat Le 28 juin 2000


L'article "La fonction de l'orgasme" a été publié en Suisse sur le site Webdo le site du journal "L'hebdo".
Le lien d'origine http://www.webdo.ch/hebdo/hebdo_2000/hebdo_26/sex2_26.html

Le lien de cette publication http://www.webdo.ch/index.html

Ecrit par libertad, à 22:38 dans la rubrique "Le privé est politique".



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